« maitrī – karuņā – muditopékșānāṁ – sukha – duḥkḥa – puṇya – apuṇya – viṣayayānām
bhāvanātaș – citta- prasadānaṁ » 1.33
Le mental s’apaise lorsque nous cultivons l’amitié, la compassion, la joie altruiste (ainsi que la gratitude) et la paix, quelles que soient les situations, envers des êtres ou des conditions qui nous semblent agréables ou désagréables. Le sage Bhoja précise qu’en cultivant ces sentiments, qui s’opposent à la haine, la paix peut naître en soi.
Cet aphorisme des yoga-sutras de Patañjali m’a fait penser à un texte de Pema Chödrön dans son livre « Entrer en amitié avec soi-même. »
« Dans la méditation et dans notre vie quotidienne, il y a trois qualités que nous pouvons nourrir, cultiver et mettre en valeur. Nous les possédons déjà, mais elles peuvent être amenées à maturité. Ce sont la précision, la douceur et la capacité à lâcher-prise.
Quand le bouddha enseignait, il ne disait pas que nous étions mauvais ou qu’il y avait une sorte de péché originel que nous aurions commis et qui nous rendrait plus ignorants que lucides, plus rudes que doux, plus renfermés qu’ouverts. Il enseignait qu’il y a une sorte de malentendu que nous avons tous en commun, comme si nous nous trouvions dans une pièce obscure… Être dans une pièce obscure n’est pas un péché … mais quelle chance si quelqu’un nous indique comment allumer la lumière. Notre vie s’en trouve vivement améliorée : nous pouvons lire des livres, voir le visage des autres, découvrir les couleurs…
De la même manière, si nous percevons nos prétendues limites (nos côtés obscurs, oserai-je ajouter – NC) avec clarté, précision, douceur, bonté et bienveillance et les ayant vus pleinement, nous lâchons prise … alors nous commençons à constater que notre monde est plus vaste, rafraîchissant, et plus fascinant que nous le pensions. En d’autres termes, la clé pour nous sentir plus entiers, moins isolés et moins enfermés en nous-mêmes, c’est d’être capable de voir clairement qui nous sommes et ce que nous faisons.
L’erreur innocente qui nous maintient prisonniers de notre style personnel d’ignorance, d’absence de bienveillance et de repli sur nous-même, c’est que personne ne nous encourage jamais à voir clairement ce qui est, avec douceur. Au contraire, il y a une sorte d’incompréhension essentielle, c’est-à-dire que nous devrions essayer d’être meilleurs et d’échapper aux choses douloureuses ; nous croyons que si nous pouvions seulement apprendre comment éviter la douleur, nous serions alors heureux. C’est le malentendu naïf que nous avons tous en commun et qui nous maintient malheureux.
La méditation consiste à voir clairement le corps et le mental, la situation qui est la nôtre, notre métier et ceux qui font partie de notre vie. Elle permet de voir comment nous réagissons à cela. Voir nos émotions et nos pensées, ici et maintenant… Il ne s’agit pas de les chasser, ni de devenir meilleurs que ce que nous sommes, mais bien de voir clairement avec précision et douceur.
À travers la pratique et dans les actions de la vie, nous pouvons cultiver la douceur, la précision et la capacité de nous débarrasser de notre étroitesse d’esprit, d’apprendre comment nous ouvrir à nos pensées et à nos émotions (au lieu de vivre inconsciemment et se laisser guider par les schémas inconscients), à tous les gens que nous rencontrons dans notre monde, comment ouvrir nos cœurs et nos esprits…
Le désir de changer est fondamentalement une forme d’agression envers nous-même. C’est la première difficulté. L’autre, c’est qu’heureusement ou malheureusement, ce sont nos complexes qui contiennent notre richesse ; notre névrose et notre sagesse sont faites du même matériau. Si nous rejetons notre névrose, nous rejetons aussi notre sagesse (coexistence et équilibre des contraires, obscurité et lumière). Une personne très en colère déploie beaucoup d’énergie, et c’est cela qui la rend attirante ; c’est la raison pour laquelle on l’aime. Il ne faut pas essayer de se débarrasser de la colère, mais plutôt de s’en faire une amie, de la voir clairement, avec précision et honnêteté et avec douceur. Cela signifie de ne pas se juger mauvais, mais aussi de ne pas la raffermir. La douceur implique de ne pas réprimer l’émotion, mais pas non plus lui donner libre cours… cela implique d’avoir reconnu complètement son sentiment de colère et pris conscience de qui l’on est, de ce que l’on fait et de lâcher-prise. Que ce soit la colère, la convoitise, la jalousie, la peur, l’anxiété, etc.., il ne faut pas essayer de s’en débarrasser, mais au contraire rentrer en amitié avec cela. Apprendre à les connaître complètement, avec une certaine douceur et apprendre à lâcher-prise ».
Précision : Pema Chödrön parle ensuite de la présence à soi dans la respiration et l’existence des pensées qui passent dans le mental et de les discerner. Comme dans l’aphorisme 1.34 des yoga-sutras de Patañjali : l’attention sur la respiration et la suspension de ce souffle engendre la stabilisation du mental, la psyché est alors rassemblée.
Douceur : Elle aborde également la notion de douceur qui peut être cultivée dans l’état de relaxation et de faire mûrir cette douceur. L’aphorisme 1.36 des yoga-sutras de Patañjali parle de la lumineuse sérénité dans la méditation du lotus du cœur ou d’autres pratiques yogiques, qui développent cette douceur pour soi et les autres.
Le dernier point est le lâcher-prise : Pema Chödrön aborde le fait que le lâcher-prise n’est pas quelque chose que l’on peut vraiment mettre en place volontairement, c’est plutôt le résultat de l’instauration des deux points précédents. Le lâcher-prise est le résultat de l’introspection bienveillante et de la douceur pour nous-mêmes et dans nos actions tout comme dans le paragraphe 1-41 des yoga-sutras de Patañjali qui parle de la réceptivité parfaite : je ne suis pas le corps, j’ai un corps ; je ne suis pas les pensées, j’ai des pensées ; je ne suis pas les émotions, j’ai des émotions. Tout étant toujours transitoire. Reconnaître et abandonner les pensées, sans critique, sans jugement, c’est certainement le processus le plus puissant pour nous amener sans violence et avec constance dans l’amitié, la compassion, la joie et la paix.
Je nous souhaite une merveilleuse année 2024 sur la voie de l’amitié, la compassion, la joie et la paix
Amitié, compassion et joie pour cette nouvelle année 2024
Merci Nadège. Un ange rempli de bienveillance, c est comme ça que je te vois. Avec un rire léger, léger, léger !
Très belle année 2024 à toi et Hugues.
Bises
Merci infiniment Nadège pour ton commentaire sur la joie et la paix. Tu réchauffes mon coeur et m’aide à traverser le départ de mon cher et tendre mari Pierre qui vient de nous quitter ce mercredi 20 décembre.
Je te souhaite une belle année 2024 et te remercie de partager tes articles profonds.
Aude
Merci Nadège pour ce très beau texte de début d’année, très inspirant, à relire au cours de l’année quand les belles intentions se seront un peu dissipées. Belle année à toi et à ceux qui te sont chers.
Françoise
Merci de tout ce travail que vous faites et que vous donnez .On s’aperçoit qu’a travers tout les écrits sur le yoga nous n’avons pas besoin de religions rien que par les yogas sutras de Pantajali à lire et à relire 1 par jour et recommencé quant on à fini, cela nous amène à plus de compréhension sur la vie et le fonctionnement du mental.
Encore une grand Merci et tout mes vœux de joie et de bonheur et de paix dans le monde.
Om Shanti.
Loka samastaha sukino baventu.
Merci pour votre message. En effet les yoga-sutras de Patanjali sont une grande source d’inspiration et de réflexion. Je pense aussi qu’à chaque fois qu’on l’ouvre, nous apparaît de nouvelles perspectives et de nouveaux sens.
Je vous souhaite aussi une très belle année de paix et de joie. Om shanti shanti shanti