Bhagavadgītā 

La Bhagavad Gītā est un poème du Mahābhārata, composé de 650 vers et divisé en dix-huit chapitres. La Gītā est un texte sacré où Kṛṣṇa partage sa connaissance spirituelle avec Ajuna Ce dialogue se déroule sur le champ de bataille dans la plaine de Kurukṣetra (l’arène sacrificielle des devas, le champ du dharma ), le premier jour de la guerre entre les Pāṇḍavas et les Kauravas.  Il est raconté par Sañjaya, le ministre et les « yeux » de Dhṛtarāṣṭra. C’est interessant ici de voir que l’intrigue se passe sur le champ de bataille , Kṣetra représente symboliquement Prakṛti ( la vie, énergie de vie, Création), et signifie « champ » ou « étendue de terre » dans le sens de « champs sacrés » ; Kuru représente une lignée englobant les guerriers et les familles royales des Pandavas et des Kauravas, mettant en évidence l’héritage culturel, les conflits et les liens avec les figures divines et la géographie sacrée. C’est à dire que nous sommes sur la terre comme lieu sacré, sur le champ sacrificiel de la vie, dans la lignée de nos ancêtres dans le cycle du Saṃsāra (le grand arbere de la transmigration). Ce champ est le lieu de la bataille intérieure.

 

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Le Mahābhārata est un grand poème épique qui raconte l’histoire des cinq frères Pandavas et la rivalité avec leurs cousins, les cent Kauravas. Mahābhārata est composé de  « Mahā » qui signifie à la fois « grand » et « total » et de « Bhārata », qui désigne la famille Bhārata , c’est à dire l’humanité toute entière ;  une grande histoire  qui fait référence aux processus universels et à l’être humain, émanations de la suprême conscience. C’est une allégorie sur le cheminement que chacun peut accomplir de sa condition matérielle à sa condition spirituelle, étape après étape. 

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Utilisation de cette page

Cette page est un échange entre les personnes qui désirent partager leurs connaissances, ressentis et interrogations sur la Bhagavad-Gītā. Pour pleinement apprécier cet échange, je vous invite à vous procurer le livre « Bhagavad gītā, commentaires du texte intégral par Swami Chinmayananda – Editions Trédaniel » – que vous pouvez commander facilement chez votre libraire préféré et sur lequel nous nous appuierons pour nos réflexions. Comme le titre l’indique, c’est interactif, c’est la raison pour laquelle, vos commentaires sont les bienvenus ; pour votre participation : le formulaire se trouve tout en bas de la page.  Les commentaires seront publiés tous les jours en principe. Les adresses mail n’apparaissent pas publiquement, et vous pouvez juste signer de votre prénom si vous le désirez. Je vous remercie pour votre collaboration. Oṃ Śānti Śānti Śānti

folio d’une série dispersée du Mahabharata. Vers 1670. Cette image a été téléchargée par le Brooklyn Museum dans le cadre d’un partenariat de contenu et est considérée comme n’ayant aucune restriction de droit d’auteur connue par les institutions du Brooklyn Museum.

Contexte dans le Mahābhārata

Au nord de l’Inde, le royaume de Bhārata est dirigé par le roi Pāṇḍu, le plus jeune des fils de Vyāsa, car son frère Dhṛtarāṣṭra, aveugle ne pouvait pas monter sur le trône. 

Auteur inconnu – peinture entre 1830-1850 Brooklyn-Museum- considérée comme n’ayant aucune restriction de droit d’auteur connue par les institutions du Brooklyn Museum.

 

Les Pāṇḍavas Côtés positifs de la personnalité

Pāṇḍu juste après son mariage tue accidentellement un brahmane et sa femme en train de faire l’amour, le prenant pour un cerf. Avant de trépasser, le sage le maudit, le condamnant à mourir sur-le-champ à l’instant même où il aurait des relations sexuelles avec l’une de ses épouses (Kuntī et Mādrī). En raison de cette malédiction, Pāṇḍu ne peut avoir d’enfants. Pourtant avec sa première épouse, il aura trois fils, Yudhiṣṭhira, Bhīma et Arjuna. Le premier, Yudhiṣṭhira est engendré par Dharmarāja (la divinité du Dharma grâce à un mantra), le second Bhīma avec Vāyu (le dieu du vent, toujours avec le pouvoir des mantras secrets de Kunti) et le troisième, Arjuna avec Indra, (le roi du ciel, de la foudre et du tonnerre – l’une des cinq formes d’Agni, le feu de l’espace) .

  • Yudhiṣṭhira fait référence à la personnification du dharma en digne héritier de son père énergétique Dharmarāja. Son arme est la lance qui représente la  la sagesse. Yudhiṣṭhira est bon, doux et compassionnel et droit (incarne le dharma). Symbolise la justice. (*Dharma : lois cosmiques et lois éthiques)
  • Bhīma : son nom fait référence à sa force extraordinaire. Son arme est la massue qui représente la détermination et l’autorité. Symbolise la force. (*Vayu, la divinité du vent symbolise le coeur)
  • Arjuna signifie : blanc, clair, brillant, de la couleur du jour en raison de sa droiture dans l’action. Son arme est l’arc qui représente la discipline, la concentration et la vivacité d’action. Symbolise le dévouement. (*Agni, la divinité du feu symbolise la transcendance)

Avec sa seconde épouse, Mādrī, il a des jumeaux, Nakula et Sahadeva, eux-mêmes engendrés par deux frères, les Aśvinī-kumāra (Aśvinīdevas) et toujours avec le mantra secret.

En guise de pénitence supplémentaire pour cet acte, Pāṇḍu renonce également au pouvoir au profit de son frère aveugle, Dhṛtarāṣṭra pour se réfugier dans la forêt et accomplir des austérités (méditation – contemplation). Plus tard, ses  enfants seront confiées aux bons soins de Bhīṣma, l’oncle de Pāṇḍu et Dhṛtarāṣṭra. Bhīṣma étant également, le commandant suprême des forces des Kauravas. Les enfants de Pāṇḍu et Dhṛtarāṣṭra sont élevés ensemble et tous considèrent que l’héritier légitime du trône est Yudhiṣṭhira.

  • Nakula : affixe : « na » dans le sens humilité et « kula » : Abhinavagupta explique que le terme « kula » dérive de la racine « kul », qui signifie « se rassembler en groupe ». Cette racine a également un sens : « condensation ». Si le premier sens fait allusion à l’ensemble des souffles vitaux, des organes sensoriels, des éléments, etc., qui constituent le corps psychophysique, le second désigne l’état de conscience « condensé » qui, pour ceux qui ignorent ce processus, est un esclavage. D’un autre point de vue, kula est kaulikī śakti, qui est à la fois l’énergie du pouvoir de la conscience qui donne vie au corps et renforce les sens et l’esprit. Ainsi, kula est à la fois la nature essentielle des phénomènes extérieurs, leur manifestation en tant que représentation perceptive et conceptuelle, et le Soi (conscience) de chaque être vivant. (Wisdom lib). Son arme est l’épée qui représente le courage, mais également le discernement et la conscience non duelle. Ses qualités sont la puissance et l’unité. Symbolise l’amour.
  • Sahadeva : « saha » :  rassembler ; « deva » : qui brille, qui appartient au ciel. Son arme est la hache qui permet de rompre avec les attachements, l’orgueil et l’illusion. Symbolise la connaissance dans la stabilité.

Le rôle de Draupadī

Draupadī est  la fille du roi Drupada, l’appui de Kṛṣṇā, et l’épouse des cinq Pāṇḍavas. Elle captive Arjuna lors de sa cérémonie de Svayaṃvara (une cérémonie où une femme , généralement une princesse choisit son mari entre tous les prétendants qui se présentent), et lorsque qu’il rentre chez lui avec ses frères, il annonce à sa mère que ce jour là, il ramène un fabuleux joyau. Sur quoi la mère répond : « Eh bien, mes chers enfants, partagez-le entre vous. » Comme ses paroles une fois prononcées ne peuvent être défaites, elle devient l’épouse des cinq frères. Lorsque Yudhiṣṭhira perd son royaume, ainsi que lui-même et Draupadī, au jeu, elle est grossièrement insultée par Duhśāsana (la soeur de Duryodhana) et par l’épouse de Duryodhana. Mais elle supporte ces insultes et d’autres du même genre avec une patience et une endurance peu communes, et à plusieurs reprises, lorsqu’elle et ses maris sont mis à l’épreuve, elle sauve leur réputation . Sans Draupadī , les cinq principes  (les 5 élements) resteraient inertes. En quelque sorte, elle est Prakṛti, Śakti, l’énergie de la conscience qui permet au monde d’exister.  Et sans Krishna (le conducteur du char), ils n’auraient aucune direction .

Les Kauravas – Les côtés négatifs de la personnalité

Dhṛtarāṣṭra, le roi aveugle est marié à Gāndhārī qui pour partager le sort de son mari, décide de se bander les yeux à vie.  Ensemble, ils ont cent fils et une fille. L’aîné de leurs fils s’appelle Duryodhana (signifiant : « dur » ou «mauvais» & « yodhana » : «combattant») et leur fille, Duḥśalā.

  • Dhṛtarāṣṭra représente manas (le mental), aveugle et guidé par les sens.
  • Bhīṣma avec la vue, et étant  le commandant suprême des forces des Kauravas représente l’ahamkāra, l’ego, la séparation, mais aussi les autres composants dont « buddhi », la faculté de discernement.
  • Gāndhārī est le pouvoir des désirs insatiables (elle s’est volontairement bandée les yeux) et pousse sans cesse son fils Duryodhana à la lutte pour le pouvoir.
  • Duryodhana représente la matérialité qui sans discernement anime la violence et la haine.
  • Duḥśalā symbolise les mauvais choix.

L’hostilité de Duryodhana envers les frères Pāṇḍava résulte de sa conviction sincère qu’en tant que fils de l’aîné de la lignée (Dhṛtarāṣṭra), il est bien l’héritier du trône. Comme son père avait dû renoncer au pouvoir en raison de  sa cécité , en faveur de Pāṇḍu, il est convaincu que ce qui lui revient de droit est donné par favoritisme à son cousin aîné Yudhiṣṭira. 

Duryodhana n’a de cesse de combattre ceux qu’ils considèrent comme ses ennemis, ses cousins. « Dans ses plans obscurs, il est aidé par son oncle Śakuni ( le frère maléfique de Gāndhārī et son ami notoire) : ce dernier joue aux dés et n’a pas d’égal dans l’art de la tricherie pour gagner. Duryodhana sachant que Yudhiṣṭira a un faible pour le jeu, l’invite donc à une partie de dés. Śakuni  joue pour Duryodhana, et inévitablement gagne. Dans sa faiblesse, Yudhiṣṭira met en jeu peu à peu tout ce qu’il possède, y compris son royaume, ses frères, et même leur épouse, Draupadī. C’est le triomphe de Duryodhana grâce à Śakuni. Il exulte et insulte les Pāṇḍavas devant toute la cours horrifiée. Il est alors obligé d’accorder la pleine liberté aux Pāṇḍavas, et tous retourne dans leur royaume. Cependant sa haine n’a pas de limite et il persuade son père d’inviter de nouveau les Pāṇḍavas à une nouvelle partie de jeu. Le perdant devrait cette fois partir dans la forêt, et vivre une vie d’austérité pendant douze ans, rester invisible durant toute la treizième année au risque de devoir mener cette monastique vie pendant douze autres années. Yudhiṣṭira accepte la partie de dés et l’enjeu, et perd de nouveau.  Les frères Pāṇḍavas sont donc condamnés à vivre  douze ans dans la forêt, pratiquant des austérités, rencontrant des sages, écoutant leur enseignement. Puis, ils passent la treizième année de leur exil au royaume du roi Virāṭa (sans que celui-ci en ait connaissance) sous des déguisements divers… Malgré les recherches acharnées de Duryodhana, ils ne sont pas découverts et demandent à revenir à Hastināpura. Cependant Duryodhana qui a déjà réclamé leur royaume, refuse de leur donner le moindre morceau de territoire. Il conclut des alliances avec d’autres rois puissants en vue d’une guerre éventuelle. Kṛṣṇa fait des tentatives de réconciliation, mais Duryodhana ne céde pas et son père n’a pas le courage ni l’intelligence de l’arrêter dans cette folie. La guerre est ainsi inévitable. » Bhagavad Gītā – Swami Chinmayananda

Ce que l’on voit ici, c’est un mental (ego) tourné vers les seules expériences matérielles qui d’un côté avec Yudhiṣṭira va mener toute sa famille à leur perte ; d’autre part avec Duryodhana englué dans le ressentiment et la haine va engager tout son royaume et ceux de ses alliées dans la guerre.  

Eléments (Pañcabhūta) & Cakras

« Les chakras sont l’essence du cheminement du yogi

  • Les choses ne sont pas ce qu’elles semblent être.
  • Ce qui est contenu dans le corps est le reflet des principes cosmiques, le flux de la création. Les éléments (pañcabhūta : Terre- Eau – feu – Air – Ether)  sont représentés dans le corps au niveau de chaque cakra. 
  • Tous les schémas (créés dans cette vie-ci ou auparavant) perdurent dans le corps astral. Lorsque nous perdons le corps physique, subsiste le corps astral avec toutes ses mémoires. Toutes les impressions sensorielles , expériences, jugements, j’aime, j’aime pas, etc. créés dans cette vie-ci ou auparavant sont conservés dans les cakras.
  • La colonne vertébrale qui est le pilier du corps dans toutes ses dimensions est l’axe du système nerveux et des réponses des sens en lien avec le cerveau ;  là se déroulent de nombreuses interractions énergétiques.
  • Les chakras sont principalement des lieux au niveau astral de canalisation, stockage et orientation du flux énergétique. »  (Siganesh Sairaman)

 

Les Pandavas – Les Eléments (fondations de la création) & Cakras

  • Yudhiṣṭhira représente l’élement de l’éther (Ākāśa) ; il est le premier né des lignées des Pandavas et des Kauravas, le support de toute la création. Il symbolise viśuddhi cakra, le chakra de la gorge, la sagesse, le dharma, l’intégrité, la clarté et la droiture.
  • Bhīma représente l’élement de l’air. Il est le deuxième de la lignée des pandavas et est  né en même temps que Duryodhana, l’aîné des kauravas. Il symbolise anāhata cakra, le coeur qui définit tout ce que nous aimons et n’aimons pas, ces sentiments auxquels nous sommes particulièrement attachés. Le pouvoir du coeur (compassion, ouverture, inclusion) est la plus grande force de la vie. C’est la raison pour laquelle Bhīma est plus grand guerrier du champs de bataille de Kurukṣetra. Durant cette bataille, Bhīma et Duryodhana vont souvent s’affronter directement, car ils constituent les deux forces opposées du coeur.
  • Arjuna représente l’élement du feu. Il symbolise manipūra cakra, le chakra du ventre, la volonté et le contrôle de soi qui vont amener à la célébration de la vie. Cependant si le côté négatif prend le dessus, l’agressivité et le contrôle des aspects extérieurs amèneront au désastre.
  • Nakula représente l’élément de l’eau. Il symbolise svādhiṣṭhāna cakra, le chakra sacré. Quand le flot de l’eau est régulier et constant, cela apporte une grande harmonie avec ce qui importe vraiment dans la vie, la flexibilité, l’adaptabilité, la création. Inversement, comme l’eau n’a pas de forme, elle peut couler n’importe où et entraîner dans des directions qui ne vont pas dans le bon sens et mener à la perte.
  • Sahadeva représente l’élément de la terre. Il symbolise mūlādhāra cakra, le chakra racine, la stabilité dans notre vérité. La terre est la base à partir de laquelle le processus va pouvoir se dérouler. En cas de doutes et d’insécurité, c’est tout le mouvement qui est altéré. 

Kṛṣṇa, le personnage central du Mahābhārata

Kṛṣṇa est le fils de Vasudeva et de Devakī ; il est le neuvième avatar de Mahāviṣṇu (la divinité de la préservation ou force intérieure de la résilience). Vasudeva a deux épouses, Rohiṇī et Devakī ; cette dernière a eu huit fils, dont le huitième est Kṛṣṇa.  Kaṃsa, roi de Mathurā et cousin de Devakī apprend par une prédiction que l’un des fils de sa cousine le tuerait ; il retient donc Vasudeva et sa femme en captivité et fait mourir leurs six premiers enfants ; le septième, Balarāma, est sauvé en étant extrait du ventre de Devakī et transféré dans celui de Rohiṇī. Quant au huitième, Kṛṣṇa, il naît  avec la peau noire et une marque particulière sur la poitrine.  Son père Vasudeva réussit à s’échapper de Mathurā avec l’enfant et le confie à un berger nommé Nanda et sa femme Yaśodā.  Kṛṣṇa et Balarāma, lui aussi adopté par la même famille, grandissent ensemble, jouant dans les bois avec des fils de bergers. C’est un enfant gai et malicieux qui joue merveilleusement bien de la flûte et qui accomplit très jeune des exploits digne des dieux. Après qu’il ait fait disparaître Kaṃsa, il construit une ville appelée Dvārakā où les habitants de Mathurā s’installent.

Kṛṣṇa fait preuve de compassion, patience, indulgence, justice, impartialité, détachement, invincibilité, générosité, honnêteté, vérité, contrôle de soi et beauté. Il maîtrise parfaitement les arts de la danse, du chant et de la musique. Ces dispositions qui sont en nous-même, puisque rappelez-vous, toutes les divinités sont des forces intérieures, et servent de guide à chacun pour cultiver une personnalité équilibrée pour vivre en harmonie.

 

Kṛṣṇa et cakra

  • Ājñā  cakra est le point unique dans le corps où la dualité est particulièrement visible, avec un côté nettement positif concernant notamment la qualité de clairvoyance. Le côté négatif est celui du mental et de l’ego non éclairés.
  • Kṛṣṇa symbolise l’aspect positif d’ājñā, l’unité, la clarté mentale tandis que Bhīṣma, celui de l’ego et de la séparation.
  • Kṛṣṇa est le guide intérieur comme une sorte de boussole qui aide à garder le cap lors des tempêtes. 
  • Un dernier point, il danse, il joue de la flûte, il nous enchante : qu’est-ce que cela dit? Vivons notre vie au mieux dans la joie ; la vie , c’est l’impermanance et elle est temporaire avec ce corps-ci!

Kṛṣṇa joue une rôle de médiateur dans le conflit. Sollicité à la fois par les Pāṇḍavas et les Kauravas, il octoie son armé à Duryodhana et il accepte de conduire le char sur lequel se trouve Arjuna au centre du champ de bataille. Ceci est très symbolique, c’est donc la conscience qui va guider Arjuna et non pas l’ego/mental. C’est Arjuna qui a demandé à Kṛṣṇa de diriger le char entre les armées, car ce qui est dit ici, c’est que nous avons le choix en quelque sorte : « sortir » de la souffrance ou « subir » notre condition matérielle. (Paragraphe : 2.39 : « Tu as reçu de Moi, jusqu’ici, la connaissance analytique de la philosophie du Sāṃkhya, la création. Reçois maintenant la connaissance du yoga, qui permet d’agir sans être lié à ses actes. »)

Le Char serait notre corps et notre mental. Les 5 chevaux, nos 5 sens et les rênes, notre capacité de discrimination qui nous permet de trouver l’équilibre entre nos désirs discordants. (Paragraphe : 2.71 : « Celui que les plaisirs matériels n’attirent plus, qui n’est plus esclave de ses désirs, qui a rejeté tout esprit de possession et qui s’est libéré de la tyrannie de l’ego, peut seul connaître la sérénité parfaite. »)

Commentaire Joëlle : « Merci pour votre initiation complète et précise. J’aborderai l’ouvrage différement. »

Chapitre 1  – La détresse d’Arjuna (p.23 – verset 1 – verset 36) – Nadège

A- Kurukṣetra

Alors que les yoga-sutras de Patañjali (un autre texte fondamental pour l’approche du yoga) sont comme des cartes IGN qui dirigent une conscience intérieure, la Bhagavadgītā, elle nous plonge au coeur de l’affect et des sentiments humains. Les êtres humains sont des êtres d’émotions qui expérimentent le monde par les cinq sens. Ces impressions sont ramenés au mental , l’ego qui va les traiter à travers le filtre de nos expériences passées, conditionnements, divers, traumas, etc. La réalité n’est donc jamais directe, elle est filtrée, c’est ce qui est appelé « māyā », l’illusion. 

Dès ce premier chapitre, nous sommes au coeur d’un drame, d’une dramaturgie tout à fait humaine. Deux camps opposés sont sur le champ de bataille. La guerre va commencer. 

Le premier verset donne le ton de l’intrigue et le sujet du poème :   » Que firent les fils de  Pāṇḍu et les miens quand désireux de combattre, ils s’assemblèrent dans la plaine sacré du Kurukṣetra (le champ de l’accomplissement du dharma), ô Sañjaya? » : ici est exposé le terme qui guide tous les pratiquants du yoga, « le dharma ». C’est un terme qui comprend le mot « dhar » , un suffixe signifiant celui ou ce qui porte/transporte/tient/soutient & « ma »  qui possède les trois significations suivantes : prospérité, honneur et mère. DHARMA , ce sont donc les lois cosmiques ainsi que les lois éthiques qui soutiennent le monde; en quelque sorte les lois fondamentales; si ces lois sont transgressées, il y a péril en la demeure. Cette première stophe est dite par Dhritarashtra  (Dhṛtarāṣṭra) alors que toute le reste de l’histoire est raconté par Sañjaya, ministre de Dhṛtarāṣṭra. Sañjaya incarne la connaissance intuitive, il est capable d’observer tous les détails exacts (sans filtre) de la bataille.

Versets 2 à 11 : ils sont consacrés à Duryodhana qui malgré sa nombreuse et puissante armée sent sa confiance l’abandonner. Il est en proie à l’agitation et projette ses « peurs » sur Droṇācārya, son maître d’armes qui a été à la fois le  précepteur des Pāṇḍavas et des Kauravas. Droṇā avait fermement condamné l’exil des Pāṇḍavas par Duryodhana et ses frères, ainsi que leurs mauvais traitements envers les Pāṇḍavas, et l’usurpation de leur royaume. Mais, en tant que serviteur du royaume, Droṇācārya a le devoir de combattre pour les Kauravas, et donc contre les Pāṇḍavas. ici, il y a deux point : Duryodhana qui se retrouve dans une situation délicate de part son « mauvais » comportement et a besoin de se rassurer sur son issue et d’autre part Droṇā qui représente le devoir et la loyauté (« Svadharma » : son propre devoir, son propre dharma, sa propre voie), doit accomplir sa mission.

Versets 12 à 19 : dans ces versets, sont recensés tous les plus grands guerriers (généraux – mahārathīs) de l’armée des Pāṇḍavas. Sañjaya décrit ce vacarme comme terrifiant pour souligner la force des Pāṇḍavas à Dhṛtarāṣṭra et lui suggérer d’avoir la sagesse de retirer ses troupes. Quand nous retrouvons dans une situation délicate que nous avons contribué à créer, il y a toujours une possibilité de faire marche arrière, s’excuser par exemple.

Versets 20 à 25 : ici entrent en scène nos héros, Arjuna & Krishna (Kṛṣṇa). A ce moment Arjuna est parfaitement déterminé à mener la bataille avec celui qui guide sont char Kṛṣṇa. Il y a un moment dans notre vie, poussés par des souffrances inapaisables, la colère ou  l’impression d’injustice et une conscience qui veut émerger (Kṛṣṇa), la décision de prendre soin de soi, de regarder, de comprendre ce qui se passe en nous, se dessine. Avec vaillance et détermination, nous sommes prêts à mener la grande bataille de notre vie. Kṛṣṇa alors prononce ces mots : « ô Pārtha, vois les Kuru rassemblés ». Pārtha  vient de « Pārthiva » qui  fait référence à « l’argile », à la « terre ». Il rappelle qu’Arjuna dans cette histoire est le représentant de l’être humain, le simple mortel. 

Versets 26 à 36 : « Alors Pārtha vit là, dans les deux armées, des pères, des grand-pères, des maîtres, des oncles maternels, des frères, des petits-fils et des amis », etc. Au moment de livrer bataille (quelle qu’elle soit aux différentes étapes de notre cheminement yogique), nous voyons ce qui nous attend, tout ce qui nous constitue va être chamboulé. Il y a de nombreuses peurs et beaucoup d’émotion. Nous sommes attachés aux différents aspects de notre personnalité, même s’ils sont problématiques et nous savons que cet engagement va nous demander d’abandonner des parties de nous mêmes. Il y a de l’apitoiement sur ce que nous sommes, ce que nous avons subis ; souvent nous ruminons là-dessus, nous ressentant comme victime. C’est un bouleversement qui nous attend et nous aimerions pouvoir y échapper, trouver le calme sans cet effort dantesque. Il y a donc une confusion qui s’installe chez Arjuna qui offre tous les signes de l’anxiété. A ce stade, ce sont ses émotions qui prennent le contrôle, il n’est absolument pas capble de voir ce qui se passe réellement et se laisse dominer. Il est vrai que pour ceux qui sont passés par ces « crises existentielles », la douleur est intense et on trouve toutes les raisons pour y échapper. Arjuna aimerait que Kṛṣṇa le conforte dans ses justifications, mais celui-ci se tait. En clair, la conscience écoute et attend patiemment. Arjuna perd sa clairvoyance et prend  le parti de ses mauvais penchants : « finalement, ce n’est pas si grave », nous nous disons quelquefois. 

 

 Commentaire Gaëtan :

  • « J’ai été d’abord surpris par le titre du premier chapitre, jusqu’au verset 7, « yoga de la détresse d’Arjuna ».
  • En quoi est-ce un yoga quand les personnages principaux, Dyryodhana et Arjuna, tels les deux faces d’une même pièce, sont soumis à la confusion et semblent avoir une attitude adharmique?
  • Je le comprends à présent comme un point de départ nécessaire pour rendre possible la quête de sens propre au yoga. L’un d’eux, continuera à se fourvoyer, quand bien même les indices de sa défaite prochaine sont déjà présents dès le début, il mène un combat sans conscience; quand l’autre traversera les flammes pour se purifier et devenir ce qu’il doit être en suivant son svardharma. »

 

Bagavagîta – Chapitre 1 –  la détresse d’Arjuna  – Versets 37 à 47 – Chérifa

Versets 37 à 43

  • Arjuna, continue son argumentation, en exposant à krishna les conséquences de l’auto destruction de la famille. Commettre le crime de tuer les membres de sa famille revient à troubler l’ordre de la sociéte, (il évoque les femmes qui deviennent corrompues , (on peut supposer que les femmes portant au monde, les individus en devenir, le renouvellement des générations, si dans leur sein, il y a des émotions de tristesse ou de vengeance cela se transmet, et porte atteinte à  la paix et l’harmonie de la societé) , anéantir l’héritage des ancêtres et emmener la famille à vivre à jamais dans l’enfer (enfermement : l’état de vie dominé par l’obscurité/l’ignorance à la  loi du dharma).
  • Les principes de transmission de généalogie sont, il me semble évoqués. Et le principe de respect des ancêtres, des racines, de l’héritage des traditions, pour que la famille et la société par extension soit  prospère et en paix, c’est-à-dire en harmonie avec le dharma.
  • Ce sont des principes, cohérent si ces crimes sont commis par avidité, colère ou autres motivations qui portent atteinte aux lois cosmiques naturelles, Arjuna argumente la situation comme si cette bataille avait lieu pour des désirs personnels motivés par la soif de pouvoir ou de richesses.

Le  verset 44 

  • Nous indique bien cela, il voit cette situation comme un péché «  par soif des plaisirs de la royauté ». On peut observer qu’à ce moment là, il ne sait plus pourquoi il est ici, dans ce char, au milieu d’une bataille qui est sur le point de commencer, il ne perçoit plus la cause de sa présence, sur le champ de bataille, la motivation de rétablir la famille, que son frère aîné puisse s’établir sur le trône, car c’est son rôle, et  c’est primordial pour ne pas faire tomber la société dans les mauvaise voies : colère avidité ignorance
  • Dire à Krishna, que cette bataille est motivée pour les plaisirs de la royauté peut nous indiquer, qu’Arjuna a l’esprit confus et le mental s’est retourné contre lui.
  • A ce moment là, le mental ego prend le dessus et devient le juge qui dénigre et nous fait croire que nous sommes une mauvaise personne, c’est le doute douloureux de faire un mauvais choix, et la peur apparaît  après avoir fait temps d’effort pour mener une action juste guidée par le choix du cœur et donc de notre conscience.
  • Le dénigrement ( envers sa vie ) est tellement forte à ce moment là, qu’il consent à son sacrifice, être tué par ses cousins, totalement désarmé et sans résistance.
  • Nous sommes quand même face à un héros, meilleur archer de son temps, entraîné et élevé en tant que prince ( c’est-à-dire qu’il a reçu les principes de noblesse : protéger la loi et les êtres ordianaires  au péril de sa vie)
  • La notion de sacrifice est inversée, sacrifier sa vie au sens noble, c’est protéger la loi du dharma sans ménager sa vie.
  • Etre dans un sacrifice comme l’annonce Arjuna, est une forme d’ingratitude envers ce que la vie lui a offert, afin qu’il puisse vivre ce qu’il s’apprête à vivre.
  • Nous sommes là, face aux tendances humaines devant un obstacle, une épreuve de la vie.
  • Nous passons par cette phase de découragement, qui alimente le petit ego qui nous entraîne au dénigrement de notre vie, de la vie elle-même,

 

Arjuna, s’effondre, lâche ses armes : l’arc divin et le carquois inépuisable (donnés par les dieux pour ce moment)

  • Lorsque nous dénigrons la vie, nous nous coupons de notre part divine, ces armes données par les dieux sont lachées au fond du char : c’est comme si Arjuna se séparait de sa part divine, de la part la plus noble de lui.

Là commence le yoga

C’est lorsque nous sommes dans une impasse, lorsque nos ressources connues sont épuisées et d’aucune utilité, lorsque nous percevons nos incohérences mentales, lorsque la souffance est tellement insurpportable que nous sommes face à ce choix

Je choisis la mort ou la vie

  • Ce premier chapitre nous indique, que c’est dans une détresse ultime que le yoga peut être enseigné .
  • Lorsque notre vulnérabilité d’être humain apparaît, la confusion de l’esprit et le corps en deconnexion au divin (il lâche ses armes : les mains, la capacité de création, de l’esprit à la matière  )
  • C’est lorsqu’il nous faut choisir entre la vie et la mort, que le maître apparait.

Krishna est dans le char, à coté d’Arjuna.

  • Il écoute, il ne lui coupe pas la parole, ne cherche pas à le stopper. Il le laisse aller au bout du bout .. de sa complainte, il le laisse aller au fond du trou.
  • On peut alors supposer que c’est une étape nécessaire pour qu’Arjuna puisse vivre ce moment complètement. Et totalement. Sans pudeur  tel qu’il est à ce moment présent, confus et envahis par la peur.

 

Chapitre 2 – Le Yoga de la connaissance – Versets 1 à 11 – Chérifa

 Verset 1 à 3

  • Après ce monologue, Arjuna est submergé de pitié et de découragement, les yeux en larmes.
  • Le deuxième chapitre s’ouvre sur le rappel de l’état du fils de Pandu.
  • C’est le point de départ.
  • Arjuna, devient la victime de la situation, les émotions l’ont emporté et il n’a pas la capacité à ce moment de faire face au défi de la vie.

Alors que Krishna est resté silencieux jusqu’alors, il prend la parole et lui répond :

  • « O Arjuna, d’où vient ce découragement dont tu est la proie à un moment aussi crucial, sentiment indigne d’un Aryen,qui t’empêchera d’accéder au paradis des héros et à la gloire »
  • Krishna s’adresse à Arjuna, en l’interpellant, et exprime sa surprise devant l’attitude du fils de Pandu.
  • Il lui demande, d’où vient ce découragement à un moment aussi crucial.
  • Il rappelle qu’une telle attitude n’est pas digne de qui il est, que cet état ne vient pas des cieux et ne peut le conduire au cieux.
  • On peut donc, voir que krishna lui montre que les émotions qui se sont emparées de lui ne sont pas une émanation du divin ou du plan cosmique  et que ça ne peut pas l’emmener à la réalisation de sa destinée, ni sur terre ni sur des plans supérieurs, c’est-à-dire la réalisation du grand Soi.
  • Il le somme de se reprendre et de ne pas se laisser aller à ses pensées et émotions,  à sa lâcheté et sa couardise ;  il le somme de chasser tout cela de son cœur.

« Debout » lui dit-il

  • Se redresser, se reprendre/ être ce qu’il est : un homme fort et courageux digne de son rang.
  • Krishna n’est pas complaisant, il est tranchant, direct.
  • On peut donc observer sa bienveillance envers son ami, car il ne dit pas des mots doux mais des mots percutants pour le faire réagir, on pourrait imaginer un saut d’eau froide comme pour lui faire reprendre ses esprits.
  • On peut se dire qu’un vrai ami ne dit pas ce que nous voulons entendre mais ce que nous devons entendre pour rester fidèle à nous-même, lorsque des situations de vie nous font perdre notre bon sens et nous coupe de notre cœur.

Versets 4 à 6

  • Ensuite Arjuna évoque Ici, Bhisma et Drona pour tenter de justifier sa volonté de se rendre sans combattre, comment peut-il combattre ces deux personnes dignes de vénération?
  • Ici nous voyons que Arjuna s’identifie à la relation.
  • Or la guerre imminente n’est pas une affaire personnelle.
  • C’est une action pour la préservation du dharma.
  • Les kauravas n’ont pas la légitimité pour régner, c’est ainsi.
  • Ils ne respectent pas l’ordre cosmique et donc les valeurs qui permettent la préservation de la dignité de la vie.
  • Les Pandavas combattent pour rétablir et préserver le dharma, pour le bien de tous les êtres vivants sur ce plan d’existence.
  • Evoquer, les noms de Bhisma et Drona nous emmènent à une vison erronée de l’enjeu, à de l’attachement, des fonctions, des souvenirs, des sentiments humains.
  • De plus Bhisma et Drona ont déjà transendé leur individualité pour une cause plus grande que leur personnalité, ils ont choisi la cause qu’il devait défendre.

Si on regarde bien, c’est parce que Arjuna a un respect sincère envers  Bhisma et Drona qu’il va pouvoir se libérer de son attachement au maître ou parent pour exprimer de façon authentique son être. Passer du petit « je » au grand « Je ».

Les versets 5 et 6 évoque des projections, le moment présent lui échappe donc le mental est en divagation et imagine des situations. On perçoit que son bon sens est corrompu par son mental, il est alimenté par les sens, la vue (des armés),  l’ouïe, ( le vacarme des animaux présents pour la guerre, les épées…). Le mental est nourri  par les stimulis exterieurs et il alimente le désir anxieux d’obtenir des bienfaits de ses propres actions, ce qui créé un mur entre le mental et l’intellect, le discernement n’est plus possible.

Verset 7

  • Arjuna, en pleine tourmente, arrive à exprimer ce qu’il ressent, la pitié dans son cœur, son esprit qui ne lui permet plus un bon discernement. Il demande alors à krishna la solution,
  • « Dis moi de façon certaine ce qui serait le meilleur pour moi » : il reconnaît la crise qu’il est en train de vivre, il se tourne vers Krishna et demande de l’aide.

Verset 8

  • Il voit sa douleur et son impuissance à ce moment d’y mettre fin (son incapacité à discerner le dharma de l‘adharma). A savoir de facon claire ce qu’il doit faire. Quel est l’action juste pour se maintenir dans la dignité du Soi.
  • Il n’a pas les ressources à ce moment-là, ou ne sait pas comment utiliser ses ressources pour sortir de cette confusion douloureuse qui le paralyse.
  • Et pourtant, le moment est crucial, la guerre est sur le point de commencer. 

Verset 9

  • Il annonce son renoncement « je ne combattrais pas » et se mure dans le silence.
  • C’est Sanjaya qui rapporte au vieux Roi Dhrtarastra la scène et le monologue d’Arjuna et pourquoi il renonce au combat.
  • Il n’y a que le roi Dhrtarastra qui peut rappeler ses armées et mettre fin à cette bataille( sur le point de commencer).
  • Mais le roi aveugle n’entend pas les conseils de son narrateur.
  • Sanjaya nomme Arjuna par le terme « Gudakesa » (celui qui a vaincu le sommeil)
  • Ce qui présage qu’Arjuna a toutes les facultés et que les conditions sont réunies pour sa victoire, son éveil et rétablir ainsi le dharma.
  • Mais le roi n’entend pas, son attachement à ses fils, (donc aux tendances adharmiques) est trop forte.

 Versets 10 et 11

  • Krishna répond à Arjuna, en souriant.
  • Cela veut dire que krishna : c’est maintenant qu’il va pouvoir toucher le cœur de l’homme,
  • « O Baratha » qui se tient déséperé entre les deux armées : se tenant entre les deux armées, symboles du bien et du mal, prêtes à livrer bataille jusqu’à la mort. Arjuna, qui symbolise l’individu s’abandonne complètement au seigneur.
  • Krishna lui expose son premier enseignement, comme un médecin qui a fait un diagnostic, il commence à lui apporter le remède.
  • Car le mal est plus profond que le défi de la guerre imminente.
  • Ici, on ne s’attache pas aux symptômes, Krishna doit éradiquer la cause de la maladie.
  • La source de son égarement.

Verset 11 : « Tu pleures sur ceux qui n’ont pas besoin de tes larmes » Et pourtant tu parles comme un sage « Mais le sage ne pleure ni sur les vivants, ni sur les morts »

  •  Lorsque nous nous coupons de notre part divine (sans commencement et sans fin), l’ego (mortel), prend la place et voile la réalite ultime de la vie et de la mort.
  • Du point de vue de l’ego ( qui appartient au plan d’existence terrestre ), il va mourir.
  • Donc, il est attaché au corps, et à tout ce qui nous ramène à la matière sans la conscience du grand tout, et de la manifestation de la vie.
  • C’est pour cela que nous sommes tristes de nous détacher / nous séparer ou que le mental nous emmène dans des imaginations catastrophiques qui ne sont  pas encore arrivées.
  • L’ego n’aime pas le changement et il ne veut pas perdre sa place.

Cet enseignement de krishna : « Le sage ne pleure ni sur les vivants ni sur les morts »

  • Cela veut dire lorsque nous sommes eveillés au principe de la vie, nous savons que la vie est éternelle, l’esprit, la conscience est le principe de la vie, peut être latent ou non latent mais la vie « est ».
  • Donc c’est la part en nous, mortel, l’ego qui nous fait croire à la perte, la séparation.
  • Car lorsque le corps a fait son œuvre, il retourne à la terre plan d’existence de ce monde et l’ego meurt. Mais pas l’être, ainsi Krishna expose la loi de transmigration de vie en vie.
  • Donc, si l’on considère que la vie, et que le dharma ( les lois cosmiques) nous dépasse et que nous faisons confiance à la vie, nous nous inscrivons dans une grande danse, même si nous ne comprenons pas tout, mais nous pouvons nous rapprocher de cette conscience en chérissant la dignité de la vie, et nous éveiller au principe de l’éternité de la vie.

Donc rien ne sert de pleurer pour les vivants ou les morts puisque du point de vue de la Vie cela est une illusion.

 

 

Chapitre 2 – Le Yoga de la connaissance – Versets 1 à 11 – Catherine

  • Verset 3 : Krsna vient bousculer Arjuna dans son état névrotique. « Ne te laisse pas aller à la lâcheté ».

                                    Krsna est resté longtemps observateur d’Arjuna, le laissant aller dans ses émotions, jusqu’aux larmes.

  • Versets 4-5 : Arjuna énumère encore des raisons de ne pas combattre. Il est empreint d’émotions qui voilent son intellect, il ne peut avoir de raisonnements cohérents.
  • Verset 6 : la situation qui lui parvient à travers ses sens, l’envahit, son mental est débordé.

Les 2 parties de l’Esprit : – le mental qui est tourné vers l’extérieur et qui reçoit les informations via les organes des sens et l’intellect qui se trouve à l’intérieur, qui analyse à la vue des expériences passées et qui donne des directives au mental pour agir raisonnablement. Chez Arjuna, ces deux parties de l’Esprit sont trop envahies, parasitées, par ses questionnements, ses émotions, il ne peut donc prendre de décisions cohérentes et se mettre en action.

  • Verset 7 : il parle de son devoir, du Dharma qui est la loi de l’existence. L’homme a une nature divine et son but est de se maintenir dans la dignité du Soi, dans sa nature divine.
  • Versets 7-8 : Arjuna demande de l’aide à Krsna, il est impatient (son intellect), veut retrouver la paix, un état de cohérence entre son mental et son intellect. Krsna à l’inverse fait preuve de patience.
  • Verset 9 : Arjuna annonce qu’il ne veut pas combattre.
  • Verset 10 : l’image de la calèche est reprise.

L’intellect discriminant, pur est le conducteur du char, qui maintient les rênes serrées (le mental) afin que les sens n’envahissent pas l’Être, le Soi. Quand l’ego s’en remet pleinement à l’Intellect, alors l’individu est dans sa force divine.

  • Verset 11 : l’ego émerge quand le Pur Soi, notre Nature Divine n’est pas reconnue.

Quand nous pensons être déterminés par notre Corps physique, notre Mental émotionnel et notre Intellect, il y a identification illusoire et donc souffrance, car nous sommes éloignés de notre Nature Divine.

Commentaires Gaëtan Chapitre II : jusqu’au verset 10 : 

  • Le narrateur finit de planter un décor : une situation qui va permettre, via la métaphore du char, de dérouler les enseignements de la Bhagavad.
  • Arjuna est l’ego découragé qui rejette les instruments de ses activités égotiques (arc) depuis le corps dans lequel il réside (char) via les organes des sens qui sont freinés, maîtrisés (cinq chevaux tenus fermement par le mental).
  • L’intellect pur doit être le conducteur du char (ici Krishna) pour obtenir une force divine

Commentaires Nadège Chapitre II : jusqu’au verset 10 : 

  • Je dirais que l’arc n’est pas l’instrument des activités égotiques, au contraire comme l’a metionné Chérifa, il est la représentation de notre capacité de discernement. Avec l’arc et la flèche, nous avons la possibilté de tirer dans la direction choisie ; Là où va la pensée, va l’énergie. David Frawley dit dans son livre :  le « yoga tantrique » : « soyez vigilant où vont vos pensées, car vous risquez de récolter ce qui est pensé ». Donc il abandonne son carquois et son arc, car Buddhi (intellect pur) : sa capacité de discrimination est voilée par ses doutes et sa confusion.

Chapitre 2 – Le Yoga de la connaissance – Versets 12 à 22 – Gaetan

 

  • Le verset 12 évoque le samsara, l’éternité des Soi et introduit l’argumentation du 13 décrivant comme absurde le fait d’être effrayé par la mort dans la mesure où elle n’est pas une fin mais un passage.
  • Jusqu’au verset 15 : l’éternité de l’être est opposée à l’illusion de l’éphémère entretenue par la confusion entre les organes des sens et leur objet.
  • C’est une invitation au détachement.
  • Le verset 15 met en avant la nécessité de cultiver l’équanimité par rapport au contact des sens, un préalable pour mettre fin au samsara et se fondre dans le Soi immortel.
  • Dans le verset 16, le Réel est défini comme ce qui perdure indéfiniment. Les versets suivants complètent cette définition en ajoutant des caractères: l’impérissable, le fait que cela ne puisse être compris (ce qu’il faut entendre comme étant insaisissable par le mental qui s’appuie sur des sens abusés).
  • Au verset 19, le Soi est discriminé de l’agent et de l’objet de l’action. Il est également dit « non-né » et donc « éternel ».
  • Ainsi, au verset 21, on comprend que le sage ne peut tuer (ni être tué) car il sait que seule la forme physique est périssable.
  • Enfin le verset 22 exprime plus directement que le corps, périssable, n’est pas le Soi mais un véhicule dont on peut se débarrasser comme d’un vêtement usé.

Chapitre 2 – Le Yoga de la connaissance – Versets 21-32 – Nadège

 

Verset 23 : « Les armes ne peuvent Le pourfendre, le feu ne Le brûle pas, l’eau ne Le mouille pas le vent ne L’assèche pas. » :

  • Ce qui est évoqué depuis le verset 12, c’est que l’être humain n’est pas seulement un corps et un mental (ego, mémoires, etc.), il est beaucoup plus que cela, il est le Soi. Le Soi est une notion très abstraite tant que nous ne l’avons pas « vécu », « expérimenté ». Ce qui est expliqué par Kṛṣṇa (krishna), c’est que souvent, nous nous réduisons à des expériences, des affects qui nous dépassent. Lorsque nous revenons à la conscience (et conscience est le contraire d’inconscience), lorsque nous sommes présents à ce qui se passe, sans être emporté par le maelstrom émotionnel, alors, c’est cette conscience qui prend les rênes (Kṛṣṇa guide le char). Je pense que cet état d’équanimité dont il est question, c’est-à-dire garder son impartialité et son détachement, dans le plaisir et le déplaisir est certainement ce qui le plus difficile pour chacun d’entre nous. Le yoga est l’art d’entraîner le mental dans le retrait pour que justement émerge cette distance nécessaire face aux évènements. La notion de réel et d’irréel est aussi un concept de prédilection dans le yoga, ou chez les bouddhistes. Comme nous avons vu précédemment, l’irréel ou « māyā », l’illusion, ce sont les impressions ramenées au mental par les sens qui seront traités par l’ego à travers le filtre de nos expériences passées, conditionnements, divers, traumas, etc. La réalité n’est donc jamais directe. La réalité, c’est ce qui existe en dehors des filtres, l’expérience directe peut se vivre, par exemple dans la méditation ou la contemplation quand le mental se tait ; là, il est possible de faire connaissance du Soi. Le Soi qui est le substrat de la vie, donc qui est tout et en tout, comme l’a mentionné Gaëtan, impérissable, éternel, et incompréhensible pour nos sens et notre ego.

 

  • Verset 23, ainsi que versets 24 et 25 : Kṛṣṇa continue dans son explication du Soi, qui comme nous l’avons dit est une notion difficilement appréhendable. Comme c’est le substrat, il n’est jamais affecté par quoi que ce soit et certainement pas par les éléments qui sont évoqués ici. Il est non manifesté, donc sans forme ; il ne peut pas vraiment êtredécrit précisément et ne peut être changé. C’est ce grand mystère de la vie qui nous happe. Cette conscience (Brahman – voir article sur le Samkhya : https://yogafleurdelotus.com/samkhya-les-differents-elements-constutifs-de-lunivers/) imprègne le vivant tout en restant en dehors de ce vivant périssable. Il n’y a pas de vie sans conscience et en même il ne peut avoir expérience de la conscience sans vie. Nous sommes conscience et nous resterons conscience quoiqu’il advienne. Alors la question de Kṛṣṇa est la suivante : pourquoi s’affliger de la mort ? Nous passons d’un état à un autre. Dans la conceptualité yogique, il est possible de distinguer « deux consciences » : Brahman, le substrat qui ne possède aucun attribut (nirguna) et atman, la conscience individuelle qui transmigre de vie en vie avec ses saṃskāras (impressions sensorielles – graines émotionnelles déjà présentes à la naissance) qui vont affecter cette vie-ci selon la manière dont nous allons la mener (ici, rien n’est écrit, nos choix conscients et inconscients vont faire éclore ces saṃskāras ou non). Mais nous sommes aussi Brahman au-delà d’atman, la conscience universelle sans aucune empreinte.
  • Dans les versets 26 et 27 : il est question de vie et donc de la fin de la vie avec ce corps qui est nôtre pour cette existence-ci. La mort est consubstantielle à la vie, c’est quelque chose qui ne peut être changé, inéluctable. Mais en même temps, nous sommes immortels, la conscience est immortelle et c’est notre nature première. Si l’on comprend cela, vraiment, réellement, alors la mort n’est plus un obstacle. D’une certaine manière, le yoga réconcilie avec la mort. La vie (avec la mort), c’est la joie. D’ailleurs, si nous prenons Kṛṣṇa qui symbolise la conscience et la conscience pleinement manifestée, c’est un personnage joyeux, qui joue de la flûte qui fait danser les gopīs (les vachères : qui sont le déploiement de la vie sous toutes ses formes), c’est une célébration. Nous oublions souvent, pris dans nos tourments affectifs de célébrer la vie. Car finalement, accepter la mort, c’est accepter la vie.
  • Versets 28 et 29 : « les êtres sont non manifestés à leur origine, comme ils le sont aussi à leur fin. Seule leur existence entre les deux nous semble manifestée, ô fils de Bharata. Pourquoi donc s’affliger à ce sujet »; « Certains Le voient (l’un, la conscience) comme une merveille, d’autres en parlent comme d‘une merveille, d’autres encore entendent parler de Lui comme d’une merveille. Pourtant, ayant entendu, nul ne Le comprend. » : dans le grand cycle du samsara (la transmigration), nous allons et nous venons. À chaque fois que nous prenons une forme, nous est voilée la conscience ; nous vivons comme des ombres. Toute la magie de la vie est de de nous transcender, revenir à la maison, sans passer par la mort, dans cette vie-ci et en jouir pleinement, grâce à notre évolution sensible au cours de chaque vie. Ce qui est dit également dans ces strophes, c’est que notre passage sur terre n’est pas inutile, nous avons la chance d’expérimenter pleinement cette conscience. Grâce à la discipline de notre yoga, les voiles s’émoussent et l’extase ou l’enstase est au rendez-vous. L’émerveillement et une des qualités qui nous anime. Nous pouvons nous dissoudre dans l’émerveillement. Il nous ramène indubitablement à la conscience.

J’aimerai partager avec vous ce magnifique poème issu du vijñānabhairava tantra, appelé aussi yoga de l’émerveillement et qui commence ainsi : Devi, la déesse s’interrogeant sur le chemin de l’union avec son bien-aimé, śiva.
« Seigneur bien-aimé et radieux de l’espace avant la naissance,
Révélateur de l’essence,
Tueur de l’ignorance qui nous lie,
Toi qui, par jeu, as créé cet univers
Et imprégné toutes les formes en lui de
jamais -fin de la vérité.
Je me demandais. . .
J’ai écouté les hymnes de la création, enchantée par les vers,
Pourtant je suis toujours curieuse.
Quel est cet univers rempli de délices
dans lequel nous nous retrouvons nés ?
Quelle est cette conscience mystérieuse qui scintille partout en son sein ?
J’ai écouté les chansons d’amour de forme aspirant à l’informe.
Quelles sont ces énergies qui ondulent à travers nos corps, nous poussant à l’action ?
Et cette « matière » à partir de laquelle nos formes sont faites…
Quelles sont ces particules dansantes de rayonnement condensé ? »

Vous pouvez prendre votre cahier ou une feuille de papier et noter ce qui, sur cette Terre ou au-delà, suscite en vous un sentiment d’émerveillement. Qu’est-ce qui vous enchante, vous fascine ? Puis chaque jour pendant une semaine ou plus, consultez votre liste avant votre pratique. Peut-être respirez avec votre liste. Remarquez à quel point habiter le rasa (qualité) de l’émerveillement glorifie votre pratique et ouvre votre cœur.

« Marchez en paix, marchez comme un tigre, marchez alors que chaque pas embrasse la terre. Marchez comme si à chaque contact de vos pieds sur le sol, vous absorbiez l’énergie de guérison, marchez avec émerveillement. » Thich Nhat Hanh. (inspiré de « Radiance Sutras and Meditation », Lorin-Roche)

  • Versets 30 – 29 – 31 : La réalité subtile résidant en chacun de nous, nous donne la liberté et la responsabilité de notre propre vie. Comme il a été mentionné auparavant, chaque personne doit se conformer au dharma, mais également à son svadharma, c’est-à-dire les conditions qui lui sont données pour accomplir cette vie-ci. En l’occurrence pour Arjuna et par ricochet, nous tous les êtres humains, notre devoir est de combattre. Si nous voulons préserver et protéger la vie dans toutes ses dimensions, nous avons l’obligation de travailler sur nous-mêmes et d’éradiquer nos mauvais penchants. Car si nous laissons les monstres qui nous habitent prendre le pourvoir, la Vie (en tant que Création, Nature, Société, etc.) est menacée. C’est intéressant de faire le parallèle avec la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui : les monstruosités sont devenues tellement effrayantes, car on les a laissés prospérer, que le monde même est en danger. Pour cela, même si le combat est titanesque et demande une vigilance de chaque instant, nous ne sommes pas démunis. Nous sommes des Kṣatriyas, des guerriers qui recherchent la lumière. Nous pouvons développer toutes les qualités dans ce sens, enthousiasme pour la justice, être convaincus par les valeurs humanistes, de compassion et de bienveillance, le courage, la force et la noblesse de coeur.
  • Versets 31-32 : là, c’est vraiment magnifique, car Kṛṣṇa dit « de plus, si tu considères ton devoir, tu ne dois pas hésiter, car il n’y a rien de plus grand pour un Kṣatriya qu’une guerre juste. » ; « ô Pārtha, c’est une grande chance pour les Kṣatriya d’être appelés à livrer une telle bataille, qui est une porte ouverte sur les cieux. ». Oui, car ceux qui sont engagés dans la voie du yoga ont tellement de chance : ils pourront se libérer des chaînes des samskaras, des vasanas (les imprégnations comme les conditionnements, éducation, traumas, etc. avec lesquels, nous forgeons, une personnalité, qui réagit aux évènements extérieurs en toute inconscience généralement). Nous avons de la chance, même si cela demande beaucoup d’efforts, comme si nous avions été choisis (alors que c’est le résultat des efforts passés), c’est un honneur, dit-il. Parce qu’enfin, nous allons nous donner les possibilités d’agir dans le sens de la Vie.

Chapitre 2 – Le Yoga de la connaissance – Versets 33 – 44 – Chérifa

Verset 33

  • Krishna lui donne la réponse à sa question, quelques vers plus haut.
  • « Si tu ne t’engages pas dans ce juste combat. » …. « Tu commettras une faute ».
  • On peut lire ici que du point de vue de Krishna, cette bataille est juste, donc déjà Arjuna peut se calmer, il n’est pas en train de faire n’importe quoi et il peut se rassurer sur les conséquences de ses actes.
  • De plus, Krishna lui répond en lui disant si tu ne combats pas tu commets une faute.
  • Là, nous comprenons qu’après avoir exposé l’immortalité de la vie, l’importance des Kṣatriyas et l’honneur d’être appelé à livrer des batailles contre les mauvaises influences qui mettent en péril le dharma… Krisna expose le svadharma. Cette notion que nous nous incarnons sur terre pour accomplir une mission, une mission qui nous permet de transcender nos « VASANAS ». Les « valises » héritées de nos vies passées.
  • L’idée peut être qu’un jour, on arrête la roue du samsara, le cycle des naissances et des morts » ( la quête de Siddhartha Gautama dit le Bouddha).
  • Bref, il expose que lorsque nous avons une difficulté, un défi ou une bataille à mener aussi difficile que ça peut être, si au moment crucial nous reculons cela revient à refuser son svadharma, or c’est pour vivre cette difficulté et la purifier par notre sacrifice (sadhana – pratique) que nous sommes venus sur ce plan d’incarnation. La vie est bienveillante, elle met en face de nous la meilleure situation pour que nous puissions transcender nos tendances négatives et transformer notre karma, épurer nos valises. Si nous renonçons avant d’avoir commencé ou en cours de route, c’est une faute envers nous-même et aussi de tout ce qui dépend de notre transformation, le principe d’interdépendance.
  • Il ne faut pas renoncer à voir nos tendances, au contraire ce sont des opportunités (voir ici que les ennemis dans la bataille ce sont nos tendances qui nous empêchent d’accéder à notre véritable SOI – conscience) nous ne pouvons agir que si nous voyons les choses qui dysfonctionne.
  • Dans les commentaires de SWAMI CHINMAYANANDA, il nous parle de « pāpa » une agitation mentale très forte qui est révélatrice d’un péché commis contre le svadharma.
  • On peut reconnaître l’état d’Arjuna au début de ce dialogue.
  • On peut donc observer l’importance de vivre sa vie en accord avec les lois cosmiques et accueillir les défis de la vie en Héros, c’est à dire ne pas fuir la réalité, protéger les valeurs éthiques, sans ménager sa vie et remporter la victoire sur notre ignorance.

 

Verset 34 à 36

  • Krisna annonce à Arjuna, le déshonneur qui s’abattra sur sa réputation de valeureux guerrier, s’il refuse de combattre et la douleur d’être méprisé s’il laisse la lâcheté mener son action.
  • Il l’appelle fils de KUNTI (sa mère), on peut se demander pourquoi il évoque le nom de Kunti, ici. Le nom original de Kunti est Pṛthā  ; ce nom signifie « la vaste », évoquant à la fois la déesse Pṛthvī (littéralement « la vaste terre ») et la description d’elle comme une jeune fille aux « yeux écarquillés »,  ce qui symbolise à la fois l’aspect nourricier de la terre et l’immensité (la vastitude de l’univers) ( Nadège). Mais Kunti signifie dire groupe, cela symbolise la communauté de la vie. 

 

Verset 37

  • Dans ce vers, Krishna expose la victoire à Arjuna, qu’il soit tué au combat ou victorieux.
  • Le résultat n’est pas important. Combattre pour le dharma est une cause plus grande, se positionner pour le respect de la vie est une grandeur qui nous emmène à la victoire sur d’autres plans d’existence.
  • Le seigneur demande à Arjuna de se lever et d’être résolu au combat.
  • D’abandonner les illusions mélancoliques. Cela nous est demandé à nous aussi, faisons face à l’existence avec courage et détermination afin de réaliser nos œuvres.
  • Krishna nous enseigne que nous pouvons mener des vies victorieuses, quelles que soient nos conditions, il nous prédit la victoire ou la victoire.

 

Verset 38

  • Ce verset nous enseigne un aperçu du Karma yoga (yoga de l’action -Nadège), c’est la première déclaration de Krishna sur la technique de la perfection du Soi.
  • L’enseignement ici, nous emmène à considérer l’impermanence de la vie et de ne pas être influencé par la fluctuation naturelle des événements : plaisir douleur, gain, perte, victoire, ou défaite (dans le bouddhisme : éloge ou diffamation viennent se rajouter et ils sont nommés les 8 vents, 4 vents favorables et 4 vents défavorables).
  • Considérer ces états comme impermanents nous permet de ne pas chercher à tout prix à vivre le plaisir, le gain, la victoire et à éviter la douleur, la perte et la défaite. Mais les considérer comme des influences naturelles et impermanentes de la vie, qui se succèdent tout au long de notre existence et donc de mener nos actions sans se soucier du résultat : nous permettre de ne pas nous identifier, le mental est donc moins sensible aux fluctuations.
  • C’est l’état d’équanimité, agir ainsi nous assure de ne commettre aucune faute.
  • Contacter notre intellect pur, discriminant nous permet d’agir sans créer de karma.
  • C’est un enseignement essentiel et profond qui nous permet de vivre nos vies sans être balloté dans l’existence.

 

Verset 39

  • Le verset 38 est éclairé : c’est la sagesse du sankhya
  • C’est une logique de raisonnement, par laquelle la nature véritable de la Réalité Absolue est appréhendée.
  • Une sagesse qui libère nos vies de la souffrance de l’attachement et des conséquences de cet attachement.
  • Et maintenant il annonce qu’il va enseigner à Arjuna la sagesse du Yoga qui permet de se libérer des liens de l’action.
  • Buddhi Yoga, la dévotion à travers l’action. Ce terme n’a pas été explicité, mais pour moi, la dévotion, c’est de croire dans la vie, et de ce fait s’y abandonner en toute confiance – Nadège
  • Lorsque, une action est accomplie, elle laisse une mémoire sur notre esprit, une empreinte liée à notre motivation qui a guidé notre action, les vāsanas.

 

Verset 40

  • Dans le Karma Yoga « aucun effort n’est perdu, aucun mal ne peut en résulter » : avec cette sagesse, l’individu travaille avec une ferme détermination et un esprit concentré, ce qui emmène à la réalisation suprême.
  • « Le moindre effort dans la pratique de cette discipline sauve d’une grande peur »
  • En menant des actions en restant concentrés, on ne s’éparpille pas, nous restons focus sur notre objectif. De ce fait, le mental est maitrisé, nous ne sommes plus victimes des agitations mentales créées par notre ego attiré par de nombreux désirs et anxieux du résultat.
  • Ce verset nous enseigne, à agir, l’esprit fixé sur une ligne d’action unique et poursuivre notre but avec détermination sans nous identifier au mouvement du mental.

 

Chapitre 2 – Le yoga de la Connaissance – Versets 41 à 49 – Catherine

Verset 41

  • Agir avec de multiples désirs, crée de l’agitation, de l’anxiété avec pour résultante un mouvement du mental.
  • A contrario, agir avec détermination et un esprit concentré, permet d’être centré sur un seul but, sans chercher de récompense. Agir de manière désintéressée nourrit notre pratique spirituelle, notre Être.

Versets 42-43

  • Certaines personnes pratiquent les rituels védiques pour s’assurer des renaissances favorables en récompense d’actions passées. Ils satisfont leurs désirs et jouissent de leur richesse, sans approfondir les textes.

Verset 44

  • Ces personnes occultent la recherche de la libération aux attachements matériels, aux plaisirs, au pouvoir et restent attachées aux résultats de leurs actions.
  • Alors que les rituels préparent l’esprit à gagner en concentration, afin de transcender l’esprit et de se réaliser spirituellement, un moyen pour y parvenir est la méditation.

Verset 45

  • Il est conseillé de s’élever au-dessus des 3 Gunas (les gunas sont les forces qui régssent l’univers, Sattva, la lumière, Rajas, le mouvement et Tamas, la matière, l’inertie ; Ces forces agissent également a niveau psychologique, avec Sattva, la sérénité, la discrimination, Rajas, l’agitation et tamas qui entraîne dans les plus bas désirs. En même temps, le yoga en cultivant Sattva, le calme intérieur et le discernement, permet doucement de se rapprocher d’un moment où nous nous élèverons au-delà même de ces forces – Nadège) qui sont la composition de toutes les créatures.
  • En s’élevant, on se découvre l’essence divine.
  • Pour cela, il est préconisé de se libérer des paires d’opposées, que sont les expériences contrastées de la vie, en prenant une attitude d’équanimité, en restant calme et pur dans notre appréciation des êtres et des situations.
  • Notre mental nous pousse à acquérir, à s’attacher à ce qui procure de la souffrance.
  • Krsna dit à Arjuna : « Établis- toi dans le Soi ». En étant dans la conscience de notre Essence Divine, il y a mise à distance de notre ego anxieux.

Verset 46

  • Pratiquer les rituels avec pureté et sans attente permet d’harmoniser l’Être. Une fois cet état atteint alors le Soi plus grand, plus vaste, non discriminant peut se révéler.
  • L’Ego a besoin de rituel.
  • Le Soi divin dépasse cette nécessité.

Verset 47

  • Souvent par peur de l’échec, nous n’agissons pas. Il est important d’agir, sans attente, en accord avec ses aspirations les plus nobles, en s’oubliant.
  • Oublier les préoccupations mentales, agir pour plus grand, procure de la Joie.

Verset 48

  • Krsna encourage Arjuna à agir, de manière équanime dans la voie du yoga. L’ego est mis en retrait (libre d’attachements), sans attente, libre de souvenirs passés, d’attente pour le futur.
  • Être dans le présent, dans l’action juste, permet cet état d’équanimité.

Verset 49

  • Quand il y a un flot de pensées : le mental est dominant
  • Quand il y a concentration, calme, c’est l’intellect qui est le chef d’orchestre.
  • Le Buddhi Yoga serait l’attitude qui vise le contrôle du mental par un intellect calme.

 

Verset 47 : Commentaire – Nadège

  • Ton droit est d’accomplir l’action, mais non d’obtenir ses fruits. Que le fruit de ton action ne soit jamais ta motivation pour agir. Ne t’abandonne pas non plus à l’inaction. »
  • Ce verset est très important et difficile à comprendre, ce que Krishna indique ici est la manière de mener nos actions. Quels sont leurs buts ? Si tu aides quelqu’un, par exemple, est-ce pour l’aider vraiment sans attendre de retour ? Ou pour être reconnu, aimé, valorisé ? Ou autres ? Ce qui est ici, c’est que chaque action comme chaque pensée ou parole doit être consciente. Agir pour le dharma (lois cosmiques, lois éthiques), pour les qualités de la vie, pour la vie et non pas contre elle. Évidemment cela demande énormément d’engagement dans la compréhension de qui nous sommes et de nos fléaux intérieurs. Car souvent, nous avons de fausses idées de nous-mêmes. La pratique du Yoga donne la possibilité de mettre la lumière dans l’ombre et de pouvoir enfin percevoir des schémas, des conditionnements, etc. qui nous échappaient jusque-là. Tout ne pourra peut-être jamais nous apparaître, mais nous faisons au mieux (vraiment, avec le cœur). L’autre point est d’agir dans le calme et non pas sous le coup de la précipitation émotionnelle (prendre le temps).
  • Le commentaire de Chinmayananda est très judicieux : agir dans le présent (faire en conscience) ; le passé est mort, le futur n’est pas encore né. Souvent, lorsque nous agissons, c’est mu par nos pulsions inconscientes (qui viennent du passé) pour quelque chose d’hypothétique dans le futur. Donc, si l’action est claire, vous aurez un but clair. Qu’est-ce qui motive votre action, pour quoi ?
  • Ce qui se passe souvent, c’est que nous ne sommes pas dans l’action, mais dans la réaction par rapport à de nombreux schémas hérités du passé. Nous n’agissons pas, nous réagissons au fait de ne pas avoir été suffisamment aimé, écouté, ou parce que nous avons été victime de violence ou tout autre chose.
  • Le yoga propose de réaliser cela, d’être honnête avec nous mêmes. Évidemment cela demande du temps, beaucoup de pratique pour lever les voiles et être capable de voir, de comprendre et d’accepter que ce qui nous est arrivé, c’est ce qui nous est arrivé, mais que nous ne sommes pas obligés d’y réagir toute notre vie. Nous pouvons en sortir et acquérir la liberté d’action.

Question : le titre du chapitre, le « Yoga de la Connaissance »,  la connaissance de quoi? Merci pour vos réponses

‌Catherine : ce que j’en comprends : 
A partir du moment ou nous rentrons en introspection, nous voyons toutes nos facettes et découvrons que nous  les voyons à travers le filtre de notre mental. Plus nous pratiquons, méditons et étudions des textes, tels que les Yoga Sutra, la Bhagavad Gita, plus nous dévoilons notre part Divine. Le fait de comprendre que tout ce qui est matériel est voué à la destruction, notre corps physique disparaîtra, alors que notre âme est éternelle. 
Gaëtan :
  • Krisna pose les bases des vérités védiques et développe les différents concepts qui sous-tendent la pratique du yoga dont le sankhya. Il décrit le début du chemin qui passe par la compréhension de soi et du monde.
  • Nous sommes des êtres incarnés mais notre essence profonde est éternelle et immatérielle ce qui doit nous libérer de la peur de la Mort. Nous faisons partie d’un Tout, la Création, régit par le Dharma (loi cosmique) et embarqués dans le Samsara (cycle de réincarnation) jusqu’à ce que nous soyons à même de nous en affranchir une fois épurés des vasanas et en prise directe avec notre Soi (conscience profonde).
  • Il faut connaître ses bases avant de nous lancer en conscience dans l’action en suivant notre svadharma (notre propre voie).

Chapitre 2 – Versets 50 à 58 – Gaëtan

Au verset 49, Krisna avait nommé Arjuna « Dhanañjaya », celui qui a conquis la richesse. On peut y voir sa volonté de lui faire voir de quoi il pourrait être véritablement riche, la sagesse du yoga, et comment y parvenir, par une action guidée par les préceptes qu’il va citer.

Krisna poursuit sa définition du yoga dans les versets 50 et 51 : le pratiquant doit être établi dans l’équanimité et le détachement vis-à-vis des fruits de l’action. En cela, il est dit dans la « dextérité de l’action » c’est-à-dire une action accomplie pour elle-même par un esprit capable de discerner plutôt que de réagir pris au piège par l’illusion procurée par les sens et par le diktat des émotions.

Le verset 52 redit la nécessité de s’affranchir du monde des sens en usant de discrimination.

Le verset 53 décrit l’état de yoga : le mental se tait et le pratiquant accède – parce qu’il n’est plus perturbé par ce que lui amènent les 5 sens et parce qu’il n’est plus anxieux vis-à-vis des fruits de l’action -, au Soi et donc à la Conscience profonde, la vérité.

Le verset 54 montre un changement d’attitude chez Arjuna qui commence à se libérer de son angoisse et, percevant la justesse des propos tenus par Krisna, lui demande comment emprunter le chemin de la sagesse.

Dans les versets 55 à 58, Krisna lui répond que pour s’établir dans la sagesse (du yoga) il s’agit :

  • D’abandonner les désirs, qui font sortir hors de soi, hors du Soi
  • Qu’il faut faire preuve d’équanimité vis-à-vis de de « rāga » l’attachement, « bhaya » la peur et « krodha » la colère ; mais aussi face à la joie et à la haine.
  • De pratiquer le pratyāhāra ou retrait des sens

Krisna, en bon pédagogue, revient fréquemment sur les mêmes notions, utilisant différentes images pour compléter, approfondir, les notions importantes : l’équanimité, l’abandon de l’anxiété vis-à-vis des fruits de l’action, le détachement vis-à-vis des sensations…

Verset 49 : « L’action est bien inférieure au yoga de la sagesse ô, Dhanañjaya. Prends donc refuge dans cette sagesse (buddhi yoga). Ceux qui ont pour seul motif le fruit de l’action sont bien à plaindre ».

  • Selon le Samkhya (https://yogafleurdelotus.com/samkhya-les-differents-elements-constutifs-de-lunivers/), Buddhi est l’intelligence discriminante, mais c’est aussi l’intelligence en quelque sorte de la conscience, lorsque les forces intérieures sont équilibrées. Avec Buddhi, nous sommes capables de voir ce qui est juste, de reprendre les rênes de notre vie, d’être le maître de nous-mêmes en tant que conscience.

(Chap 2– 58) : « Le sage qui, à l’image de la tortue ramenant ses membres sous elle, retire ses sens de leurs objets est fermement établi dans la sagesse ». Equanimité : détachement, égalité d’humeur, sérénité : l’esprit n’est plus dérangé par les perceptions, les sensations, les émotions, les passions. Cet état d’immobilité de l’esprit, au delà de la conscience de l’ego, est une condition essentielle de la connaissance réelle et de l’expansion spirituelle. Quelques exercices : https://yogafleurdelotus.com/pratyahara-retrait-des-sens-exercices/

 

Chapitre 2 – Le Yoga de la connaissance – Versets 59 – 66 – Nadège

 

Verset 59 : « les objets des sens se détournent de l’homme qui s’abstient, laissant en arrière-goût le désir. Cependant, le désir lui-même s’évanouit à la vue du suprême » ; verset 60 : « Même le mental de l’homme avisé, ô fils de Kunti, est emporté avec violence par ses sens tumultueux, bien qu’il fasse tous ses efforts pour les maîtriser. »

  • Si l’on s’abstient de nourrir les sens par un contact incessant avec l’extérieur, il y aura forcément un moment où l’appétence pour cette nourriture s’affaiblira ; cependant il faut se rappeler que nous sommes façonnés de telle manière que les désirs restent sous-jacents, latents et peuvent resurgir à tout moment en raison de nos empreintes sensorielles. La personne « lambda » sait combien il est difficile de rester dans la discipline, la maîtrise de soi, mais le sage, lui-même peut être entraîné par ses sens. C’est la raison pour laquelle, la vigilance reste de mise quel que soit l’endroit où nous en sommes.

Versets 61

  • En fait ce qui est ici dans ce verset, c’est que pour réussir à échapper au mental, à l’ego ; il faut s’abandonner totalement en toute confiance à la vie, au divin. Nous avons besoin du soutien de l’univers, d’être tout entier tourné vers cette conscience, se laisser entièrement absorber, lâcher-prise.

Versets 62 – 63 : « Quand un homme pense aux objets, l’attachement à leur égard naît en lui. De l’attachement, naît le désir, du désir naît la colère » ; « De la colère naît l’erreur de compréhension, de cette erreur vient la perte de la mémoire, de la perte de la mémoire naît la destruction de la discrimination, de cette perte de la discrimination, il périt ».

  • Puis Krishna explique ce qui se passe lorsque les sens sont débridés. Il reprend son analyse quant à tout le processus qui mène à la perte, non seulement de soi-même, mais du monde. Lorsque nous sommes attachés à une façon de faire, un schéma, une personne, des pulsions, c’est la passion qui prend le dessus et nous perdons nos moyens. Alors la haine peut prendre le contrôle. Quand Buddhi (l’intelligence de discrimination) est oublié, ignoré, la violence va s’exercer et mener au désastre ; c’est toujours le même scénario !!!

Versets 64 – 65 : « Mais l’homme à l’esprit discipliné, se mouvant parmi les objets des sens avec ses sens tenus sous contrôle, délivré à la fois de l’attraction et de la répulsion, atteint la paix ». « Dans cette paix, toutes les souffrances sont détruites, car l’intellect d’un être tranquille bientôt devient ferme. »

  • « Se mouvant parmi les objets des sens avec ses sens tenus sous contrôle » : ce qui est dit ici, c’est qu’il n’y a pas de fuite ou de refoulement, mais en conscience de ce qui se passe intérieurement (les sens tenus sous contrôle », la paix peut s’installer. Cela fait écho au verset 50 : verset 50 : « celui qui possède cette sagesse de l’équanimité est affranchi dans cette vie des bonnes et des mauvaises actions ; par conséquent, consacre-toi au yoga. La dextérité dans l’action est le yoga. » :
  • C’est un verset crucial, car souvent, on se demande, ou certaines personnes nous demande à nous qui cheminons dans le yoga, « que puis-je faire pour lutter contre l’anxiété ? ». La réponse est claire, mais il faut la mettre en place : la pratique, la pratique, la pratique ! À la fois sur le tapis et à chaque instant de notre vie : « consacre-toi au yoga » : dans les mouvements, la respiration, la méditation (la respiration et la méditation sont des « armes fatales » contre l’anxiété et les agitations. Cependant, cela demande une certaine force qui amènera la discipline et ceci se cultive d’abord sur votre tapis. «La dextérité dans l’action est le yoga » : le savoir-faire dans l’action est le yoga.
  • Le terme équanimité signifie sérénité, calme : c’est une notion très complexe, à la fois dans sa compréhension et dans sa mise en place. L’état d’équanimité demande un grand état de présence et de disponibilité par rapport à soi-même. C’est d’abord observer les impressions mentales, les mouvements émotionnels, en prendre note pour être capable de comprendre comme cela nous affecte (et où dans le corps, dans la respiration), pour se donner la possibilité de s’en détacher. Il n’y aura pas d’état d’équanimité sain, si nous refoulons. La sérénité ne peut s’établir que si nous sommes conscients des états émotionnels et de la manière dont ils nous affectent. Je dirai souvent qu’au début, avant que le calme ne revienne, il faut parfois quelques heures, quelques jours. Puis au fur et à mesure, un certain nombre d’évènements n’affecteront pas ou moins grâce à cette lumière qui a été mise sur les schémas traumatiques qui ont été progressivement dissous par le fait de les reconnaître.
  • Ce qui est certain de toute façon, c’est qu’avec un esprit apaisé, il sera bien plus facile de mener sa vie.

Dans le verset 65 : avec la paix, Buddhi va se conforter et c’est un cercle vertueux, plus Buddhi sera présent et plus la paix s’installera. Et vice et versa ; c’est un conseil judicieux et surtout cela nous aide à poursuivre nos efforts, car nous savons que même si certaines empreintes mentales ne disparaîtront pas vraiment ou pas complètement, avec Buddhi, nous gardons quoi qu’il en soit la paix. La « Paix » est un mot très fort, car la paix intérieure engendre la paix extérieure. « Travailler sur soi » n’aurait pas de sens si ce n’était de protéger le dharma, de faire communauté, société en paix et en partage.

Verset 66 : « Celui qui n’a pas la fermeté nécessaire pour contrôler ses sens ne peut réaliser le Soi. Il ne peut méditer, et donc, il ne peut connaître la paix. Et sans la paix, où est le bonheur ? »

  • La fermeté nécessaire : La ténacité ? Le yoga insiste beaucoup sur le feu intérieur ; le feu développé dans les pratiques du yoga fortifie les qualités de courage, de détermination, de clarté mentale aussi. Donc pour apprendre à contrôler les sens, il faut de la discipline, un travail régulier et constant. D’ailleurs rien ne peut être appris sans la persistance. Celui qui ne peut pas se tenir à cela ne peut pas méditer par exemple. La méditation demande de la persévérance, et sans la méditation, la paix intérieure est difficilement atteignable. Le bonheur ne peut pas exister dans l’agitation et la souffrance. La paix est une condition sine qua non au bonheur.

Chapitre 2 – Yoga de la connaissance – Verset 66 à 72 – Chérifa

 

Verset 66 et 67

  • Ce verset nous dit que si nous n’avons pas la fermeté nécessaire pour contrôler nos sens, nous ne pouvons pas nous réaliser. La méditation n’est pas possible sans cette maîtrise et donc l’installation de la paix intérieure.
  • Kṛṣṇa (Krishna) nous interroge : « et sans la paix ou est le bonheur ? » : la réalisation de notre Soi a pour objectif le bonheur.
  • Or, quand le mental est stimulé par les sens tournés vers l’extérieur, la capacité de discrimination est emportée par l’agitation du mental, on se retrouve alors balloté : la métaphore d’un navire emporté par les vents, est utilisée pour illustrer l’impuissance qui peut être la nôtre. Le navire c’est nous, le vent les sens non maitrisés et l’eau la vie.
  • Pour naviguer dans les eaux de la vie, Kṛṣṇa nous dit de contrôler l’arrivée des stimulus extérieurs et d’être fermement établis en nous-même c’est la condition pour le bonheur.

 

Versets 68 et 69 et 70

  • De ce fait, « celui qui retire complètement ses sens du contact avec les objets, est fermement établi dans la sagesse ».
  • Stopper les stimulus extérieurs, nous permet de nous poser à l’intérieur de nous-même.
  • Le regard que nous portons alors sur le monde n’est plus coloré par une perception orientée ou conditionnée.
  • Nous percevons la réalité de la vie.
  • De ce fait, l’ego n’a plus de prise et la paix s’installe dans l’être.
  • Le sage n’est plus ballotté par les situations extérieures, il est établi en lui-même. « Celui en qui les désirs entrent sans troubler sa plénitude (…) atteint la paix.
  • Maitriser ses sens, avoir la capacité d’être à l’intérieur de nous-même, nous fait percevoir que nous sommes complets, que pouvons-nous donc désirer si nous ressentons la plénitude ?
  • Il n’y a aucun vide à combler.

 

Versets 71 et 72

  • La paix s’installe lorsque nous abandonnons la notion de possession. Nous sommes alors libérés du « je » et du » mien » : « Ceci est l’état de Brahman »
  • Nous sommes donc éveillés à notre vraie nature
  • La vie est la vie, énergie indifférenciée qui se manifeste à travers ce corps.
  • Lorsque je suis établie en moi-même et que je perçois la réalité de la vie, affranchie de l’ego, de la séparation, je peux alors entrer en résonance avec l’univers.

 

Ainsi se finit le deuxième chapitre de la Bhagavad Gītā, « La connaissance de soi »

  • La connaissance de ce que nous sommes, lorsque nous sommes libérés des imprégnations, des mémoires, de l’ego : nous sommes une composante de Brahman (la conscience).
  • Kṛṣṇa nous enseigne comment retourner à l’unité, comment retrouver notre véritable soi. La connaissance de soi, « SAT NAM » je suis cela, je suis Brahman.

Chapitre III  – Le Yoga de l’action – Versets 1 à 8 – Catherine

  • Verset 1 : Krsna recommande d’agir et tantôt exhale la voie de la connaissance et le renoncement. Arjuna est perdu, il ne comprend pas pourquoi Krsna qui préconise la voie de la connaissance lui dit de participer à la guerre. Il veut savoir qu’elle est l’action désintéressée, la voie qui mène à la sagesse.

 

  • Verset 2: Arjuna demande « Quelle est la voie par laquelle j’atteindrai sans nul doute le Suprême ? » Arjuna avec ce mot semble avoir compris qu’il ne s’agit pas d’une bataille pour nourrir son ego, mais qu’il est là pour répondre à plus grand en nommant « le Suprême ».

 

  • Verset 3 : Krsna dit « … il y a deux voies… la voie de la connaissance du SANKHYA et la voie de l’action des Yogis » :
  • Le Sankhya Yoga nous permet de rentrer en introspection, c’est la voie contemplative, de la méditation.
  • Le Karma Yoga, le yoga de l’action pure, sans attente de résultat, elle est faite par et pour plus grand (par notre partie Divine et pour le Divin en toute chose). Le mental se purifie dans le Karma Yoga.
  • La voie de l’action est un moyen, une préparation vers la voie de la connaissance qui mène à la réalisation.

 

  • Verset 4 : « L’homme n’atteint pas l’état du « non-agir » en s’abstenant d’agir et n’atteint pas la perfection par le simple renoncement (à l’action) » :
  • L’état de réalisation est un état libéré des désirs, des pensées.
  • J’ai besoin d’un éclaircissement pour ce verset. Il reste abstrait.  Il y a deux voies pour atteindre l’état d’inaction de la conscience :  Jñānayoga ou Saṃkhyāyoga ​ (« chemin de réalisation spirituelle à travers une recherche philosophique de la vérité ») et le karma yoga (à travers l’action). Ce qui est essentiel est la pureté de l’esprit (mental), il est important de s’acquitter de ses devoirs sans attachement aux résultats. C’est un aller et retour entre l’étude et l’action, le travail sur soi. Au début, l’action est essentielle, accomplir le travail et apprendre  à le faire sans vouloir un résultat. Personne ne peut atteindre le Soi sans travail, car l’oisiveté ne mène à rien et est aussi une illusion. On ne gagne ni sur le plan matériel ni sur le plan spirituel. Le chemin est long et progressif, il faut déjà apprendre la discipline corporelle et mentale pour se placer dans l’action, puis dans l’action juste. Ce qui importe est d’éliminer les mauvaises pulsions en soi-même. Krishna dit « mettez-vous au travail », car le mental (ego) est un cheval retors et il faut se libérer de son esclavage pour trouver la paix. La paix est la seule voie pour vivre notre humanisme, faire communauté en harmonie. Mais c’est aussi dans cette action, s’abandonner en toute confiance à la vie. Nadège

 

  • Verset 5 : nous sommes nés d’une étincelle d’énergie, c’est notre nature divine (Prakriti). Nous sommes composés des 3 Gunas : Sattva, Rajas et Tamas. Même si nous n’agissons pas physiquement, notre esprit est en activité. L’inactivité absolue, c’est la mort physique.

 

  • Verset 6 : réfréner ses organes des sens est une action physique, mais il est important de les réfréner aussi au niveau mental, car si une pensée négative est toujours présente alors elle prend de l’espace, espace qui ne peut être occupé par le calme et l’harmonie. La réalisation spirituelle passe à la fois par le corps physique et le corps mental.

 

  • Verset 7 : Quand nous maîtrisons nos sens, notre mental et que nous agissons de manière désintéressée, nous nous réalisons spirituellement.
  • Quand nous sommes pleinement dans une action juste, par exemple préparer 1 met pour des personnes que nous ne connaissons pas, nous sommes pleinement à cette tâche et nous le faisons de manière désintéressée, nous sommes détachés de ce que pourraient nous suggérer les stimulations sensorielles autour de nous. Nous libérons alors de l’espace en nous.

 

  • Verset 8 : nous avons un rôle familial, sociétal et nous nous devons de l’accomplir, c’est notre devoir. A l’inverse, nous sommes dans l’inaction. Il en est de même pour maintenir notre corps en bonne santé, nous nous devons d’être actifs mentalement et physiquement.

 

Chapitre 3 – Yoga de L’action – Versets  9 à 16 – Gaëtan

  • Dans les versets 9 à 16, Krisna poursuit sa description de l’action désintéressée et démontre en quoi elle est une voie nécessaire en vue de la réalisation personnelle tout autant que dans la préservation du dharma (loi cosmique).
  • Verset 9 : la notion de « Yajña » est abordée, une action réalisée avec le sens du sacrifice. Cela renvoie à une attitude de dévotion qui va permettre d’agir sans créer de nouveaux vasanas (empreintes), de nouvelles valises karmiques qui nous freineraient dans notre accomplissement. C’est un message d’espoir : on peut agir avec sagesse.
  • Verset 10 : tout est là dès le départ. « Toutes les vaches sont dans l’étable » (Upanishads), et parmi elles, Kamadhenu qui symbolise l’abondance. La sagesse consiste à voir que cette abondance possible ne provient pas de l’extérieur, d’une conquête, mais au contraire d’une capacité à donner qui a pour corolaire de nous faire recevoir ce dont nous avons besoin.
  • Verset 11 et 12 : Krisna décrit un cercle vertueux. L’action réalisée avec dévotion (en direction des devas – les forces intérieures sacrées, forces divines) est récompensée par la grâce, un potentiel de réalisation qui engendre la réalisation de l’action comme du Soi. Il faut rendre etc. que l’on reçoit au risque de briser ce cercle vertueux si on ne le fait pas.
  • Verset 13 : ne pas chercher à obtenir et capitaliser amène la satisfaction et permet de rester pur. L’inverse nous souillerait.
  • Verset 14 et 15 : Krisna décrit une chaîne dont le point de départ est Brahman (la conscience universelle). Il a engendré la création dont découle l’action qui permet le sacrifice lequel engendre la pluie qui fait naître la nourriture. Il est nécessaire d’avoir conscience que la Conscience (universelle) est en toute chose, jusque dans l’action qui doit être désintéressée. C’est à l’image du fonctionnement de l’univers, telle la pluie qui tombe sans contrepartie.
  • Verset 16 : aussi nous sommes invités à ne pas nous lancer dans une quête insensée : la satisfaction incessante de nos appétits nourris par les sens, et rester purs en respectant le dharma décrit plus haut.

 

* Yajña est le concept central de Śruti (qui signifie texte révélé ou écritures primaires des vedas Les Srutis sont : les Vedas (Rig, Sãma, Yajur et Atharva) ; ils incluent la spiritualité, la philosophie, l’art, la médecine, la science, la technologie, la langue, la musique, etc. ; la Bhagavad Gîtã en fait partie.

 Le mot yajña vient de la racine « yaj », qui signifie vénérer. Yajña est un concept vaste et difficile à traduire en français. Le mot le plus proche est « sacrifice ». Il existe de nombreux synonymes du mot yajña qui expriment différents aspects de ce concept. Par exemple, on l’appelle aussi « yajña karma », qui signifie action ou acte de sacrifice (c’est-à-dire en total abandon à la vie, l’univers), d’offrande ou de vénération. (En vert : commentaires Nadège)

 

 

 

Chapitre 3 – Yoga de l’action – Versets 17-24 – Nadège

 

  • Verset 17 : « Mais l’homme qui se réjouit seulement dans le Soi, qui trouve le contentement dans le Soi seul n’a plus rien à accomplir » : dans ce verset Krishna décrit le sage libéré, immergé dans la conscience (le Soi). Cependant, ce n’est pas le cas de la plupart d’entre nous qui devons continuer le travail. Il faut quand même être conscient que toutes les distractions proposées dans notre monde peuvent nous éloigner de la tâche qui nous incombe : affaiblir, annihiler les tyrans et démons intérieurs qui nous empêchent de fonctionner en harmonie.
  • Verset 18 : celui qui atteint l’état de félicité n’a rien à attendre du monde. Tout est en lui. Cela me rappelle cette légende indienne :

Bāla – L’enfant – l’inépuisable, l’omnipotence :

C’est le déluge cosmique, le ciel est obscurci par les nuages, des pluies diluviennes s’abattent sur la terre, les rivières, les fleuves et les océans déferlent en grondant. Un sage appelé Mārkaṇḍeya est le dernier témoin de ce cataclysme, cette destruction annonciatrice de la régénération. Il arpente la terre devenue marécage, à la recherche d’un refuge ou d’un compagnon de route. Le vieil homme épuisé et désespéré s’est arrêté pour contempler le désastre quand il aperçoit à la surface de l’eau une immense feuille qui flotte tranquillement. Sur ce radeau de fortune, un petit enfant est allongé et suce son orteil. Parfaitement absorbé par sa tâche, il ne semble pas avoir conscience du chaos autour de lui. Mārkaṇḍeya s’approche de la feuille, l’enfant ouvre la bouche et le sage est instantanément aspiré dans l’enfant. Dans le ventre de l’enfant règne un monde paisible d’arbres, de rivières, d’oiseaux, de vaches, de villages et de villes. Tout ce qui avait été détruit par le déluge. Dans ce lieu paisible, le sage reprend sa pérégrination pendant plus de cent ans sans jamais pouvoir en faire le tour. Puis, un jour, l’enfant expire et le sage est recraché à l’extérieur. « J’espère que tu t’es bien reposé, » lui chuchote l’enfant. L’enfant qui contenait la création n’attendait que l’éveil de Viṣṇu pour redonner la vie à l’univers. Il savait que les choses ne meurent jamais ; elles disparaissent un moment et réapparaissent à nouveau. Symbolisme : dans la tradition du yoga, ceux qui retrouvent leur sagesse sont comme l’enfant, libres de tout attachement, de toute aversion ; ils sont maitres de leurs désirs. Dans la présence de l’instant présent, ils restent sans jugement et sans projection. La position de l’enfant permet de revenir à un état de présence en soi dans une parfaite sécurité comme l’enfant dans le ventre de sa mère. Elle donne l’occasion de s’observer tranquillement en prenant conscience de ses possibilités et de ses restrictions sans opinion préconçue, concentré et paisible.

  • Verset 19 : « Par conséquent, accomplis toujours les actions qui doivent l’être, sans attachement. Car en agissant sans attachement, l’homme atteint le Suprême » : l’action qui est accomplie sans attendre de résultat, dans l’abandon à la vie est un moyen de libération. Tout en étant engagé dans l’action, dans une tâche, y mettre tout notre cœur tout en restant dans la justesse de cette action. Cette partie de la Bhagavad-Gītā finalement insiste sur le fait de placer la conscience au cœur de notre vie. Parce que si nous savons pourquoi, nous pensons, disons ou agissons de telle ou telle manière, nous trouverons la justesse dans cette expression.
  • Verset 20 : ici, Krishna évoque d’anciens rois qui ont atteint cette sagesse et rappelle à Arjuna, sa condition de prince et donc d’autant plus sa responsabilité envers lui-même et son peuple. Je dirais que cela va plus loin, nous suggère que nous sommes les rois, reines, princes et princesses de notre propre vie et que nous avons une responsabilité dans ce sens, envers notre communauté.
  • Verset 21 : « Quoique que fasse un grand homme, d’autres l’imitent. Quel que soit le modèle qu’il représente, il est suivi par les autres » : ce verset est intéressant et montre que plus notre position sociale est élevée, plus notre comportement doit être exemplaire, car il sera suivi d’effet. Mais tout comme parent ou dans notre communauté, nous pouvons servir la vie, être au service pour le bien de tous. La devoir de sagesse dans la société fait partie du respect du Dharma. C’est un précepte imortant car de cette probité dépend le bien-être et l’harmonie de toute une société. Nous voyons aujourd’hui que nos élites sont loin d’offrir un exemple et leur comportement entraîne énormément de souffrance.
  • Verset 22 : « « Il n’y a rien dans ces trois mondes, ô Partha (prince, fils de la terre – ce qui demande de l’humilité), que Je doive faire ou que je doive atteindre. Pourtant, Je m’engage dans l’action » : Ici Krishna se place comme conscience créatrice (les trois mondes de la matière, de l’énergie et de la spiritualité). La conscience dans la création de la vie est en action. En action, c’est le juste ordre.
  • Dans les versets 23 et 24, il insiste sur ce mouvement. La vie est mouvement, la vie est impermanence, c’est la loi. Nous œuvrons pour la loi, le dharma. L’action s’inscrit dans une démarche de vérité (de la conscience). L’intelligence cosmique est à l’œuvre dans tout ce qui est vivant. Notre devoir pour assurer la paix est d’inlassablement, questionner notre place, notre manière d’être. Ici, il est question de caste dans le sens où si votre prédisposition est d‘être un paysan par exemple, il faut suivre votre voie. Chacun a sa voie (svadharma) au sein de la grande voie universelle. Cette notion des castes a été dévoyée par les nobles qui en ont profité pour asseoir leur pouvoir et asservir en assignant certaines parties de la population à certaines tâches.

 

 

Chapitre 3 : Le yoga de l’action – Versets 25 à 32 – Chérifa

 

Verset 25

  • Dans ce verset, on distingue l’ignorant et le sage.
  • Lorsque nous sommes ignorants, nous agissons avec attachement, c’est-à-dire que nous attendons un résultat personnel lié à nos actions.
  • Le sage doit aussi être dans l’action, mais pas pour un bénéfice personnel et mener son action pour le bien du monde.

 

Versets 26, 27 et 28

  • Ce verset nous enseigne que ce qui est important c’est de mener nos actions avec dévotion et encourager les personnes ordinaires à agir, même s’ils sont attachés à leurs actions.
  • Ici, nous commençons à être enseignés à devenir une preuve factuelle, et non pas un donneur de leçon.
  • Le risque est de devenir inactif, or il n’y a pas de spiritualité en dehors de la vie quotidienne.
  • Parce que toutes les actions posées dans ce monde proviennent des gunas (des forces créatrices de l’univers).
  • Une personne non éveillée croit que c’est elle qui a décidé de cette action, l’ego nous fait croire que c’est nous qui décidons d’agir. Le mental dirigé par la force égotique s’approprie les œuvres.
  • Celui qui distingue les modalités (formes particulières, ici les forces de création : lumière, mouvement et matière) et leurs fonctions, a donc la capacité de discrimination.
  • Celui-ci n’est pas attaché au résultat de ses actions ; il n’y a pas d’attente. J’agis sans attendre de résultat, l’action n’est pas pour satisfaire un désir, mais pour honorer la création.

 

Verset 29

  • Dans ce verset, on nous rappelle qu’une personne dont le mental est « égaré » donc qui ne s’est pas éveillée aux modalités de la vie, les sens tournés avec excès vers l’extérieur va agir, attachée à ses actions pour obtenir un résultat.
  • L’ego se nourrit de l’action ou de l’inaction puisqu’on croit être à l’origine de cette action, on s’identifie à l’action.
  • Krishna nous redit que le sage qui s’est libéré de ses attachements et celui qui connaît le principe de manifestation des modalités de la vie ne doit pas intervenir de façon brutale auprès des personnes qui sont victimes de leur méconnaissance.
  • Le sage agit avec bienveillance, sans bloquer le courant de la vie.
  • Avec humilité, il peut ainsi agir pour le bien de la société.
  • On comprend alors que tout est la vie. Il n’y a pas de bien ou de mal.
  • Nos actions sont des actions ; plus nous avons conscience des forces qui agissent à travers nous, plus nous pouvons nous libérer de nos imprégnations. Nous ne pouvons pas transformer ce que nous ne voyons pas, laisser ainsi se manifester les forces de la vie à travers nos actions nous permet grâce à la maîtrise du mental et à notre capacité de discrimination de nous libérer. Le yoga de l’action est donc une libération, un apprentissage de l’humilité et de l’abandon à plus grand que soi.

 

Versets 30 et 31

  • Verset 30 : « Me dédiant toutes tes actions, le mental fixé sur le Soi, libre de l’espoir, de l’égoïsme et de toute fièvre mentale, combat ! »
  • Arjuna est un guerrier, donc ses « vasanas » (empreintes) sont liés au combat, le prince guerrier n’a pas comme modalité d’expression la contemplation, mais le combat.
  • Krishna, lui délivre l’attitude à adopter pour agir ; offre ton action au seigneur, offre tes actions à plus grand que toi ; soit libre d’agir comme tu dois le faire sans attendre quoi que ce soit, laisse la vie s’exprimer à travers toi afin de libérer tes imprégnations.
  • « Fixe ton mental sur le Soi » ; se fixer sur le Soi pour agir équivaut à dire : concentre ton esprit sur le divin, sur la source de la création en toi et autour de toi.
  • La notion d’espoir est liée à une attente d’amélioration des conditions et l’égoïsme à une attente de résultat personnel. Krishna lui confirme que l’attitude pour combattre (se dresser face aux manifestations des imprégnations, qui résultent de nos attachements) est d’être dans une attitude où l’action est offerte à plus grand que soi, sans rien vouloir changer, ni obtenir quoi que ce soit.
  • Le sacrifice est une action dirigée grâce à l’énergie vitale qui se manifeste à travers notre corps sans rien attendre en retour.
  • Verset 31 : « Ceux qui pratiquent constamment cet enseignement, avec foi, sans tergiverser, sont ainsi libérés du poids des actions » : « pratiquer constamment » ; on nous rappelle une des règles fondamentales du yoga, ne jamais abandonner et pratiquer tout le temps. Ce qui nous rappelle que ce n’est pas facile, rien n’est jamais acquis dans cette bataille ; ne jamais baisser la garde.
  • La foi, la pratique et l’étude indispensable pour se libérer du poids des actions, « karma ».
  • Mais ce verset est aussi une promesse que nous avons la capacité de nous libérer du poids des actions si nous avons le courage de nous dresser et la détermination de ne jamais abandonner.

 

Verset 32.

  • Au contraire, ceux qui « méprisent » cet enseignement, c’est-à-dire le rejettent parce qu’ils se croient au-dessus ou plus forts que les fonctions de vie, ceux qui ne pratiquent pas, ceux qui ont des connaissances erronées et qui ne développent pas leur capacité de discrimination, Krishna affirme qu’ils « courent à leur perte ».
  • Cet enseignement nous offre une façon de vivre notre vie de manière noble et entière.
  • C’est une voie d’initié, qui permet à la Vie de se manifester à travers les formes de la création, sans vivre dans l’illusion, donc libéré de la souffrance liée à l’incarnation.

 

Chapitre 3 – Le Yoga de l’Action – Verset 33 à 43 – Catherine

 

  • Verset 33 : tous les êtres vivants agissent en fonction de leurs « vasanas », leurs tendances profondes, celles-ci déterminent les actions. Même un être sage qui a étudié les textes… ne peut échapper à ses tendances. Le désir de progresser peut permettre de transcender sa nature propre.
  • Verset 34 : l’attachement ou l’aversion des organes des sens pour un objet est naturel, à chaque expérience sensorielle, le mental forge une expérience positive ou négative. Il est important de transcender sa nature propre en étant maître de ses instruments sensoriels et de son ego, par la discipline dans les pratiques spirituelles.
  • Verset 35 : ici, il est dit qu’il est important d’accomplir ses tâches selon sa nature profonde pour progresser spirituellement.
  • Verset 36 : Arjuna s’interroge et interroge Krsna sur les raisons qui poussent l’Homme à commettre de mauvaises actions, comme une force invisible, alors qu’il aurait envie de suivre le Dharma (devoir). Nous connaissons ce qui est bien, mais quelque chose en nous, peut nous pousser à faire le mal.
  • Verset 37 : Krsna parle du désir dont découle la colère, qui nous pousserait à agir de manière négative.
  • Verset 38 : nos attachements aux objets matériels nous voilent notre sagesse intrinsèque. La fumée cache le feu, la poussière empêche de voir son image sur le miroir, nos désirs nous empêchent de voir notre être spirituel.
  • Verset 39 : « ô fils de Kunti » Krsna s’adresse à Arjuna qui est né de l’union de Pandu et de Kunti. La sagesse est enveloppée par le désir et il est comme le feu, difficile à maîtriser.
  • Verset 40 : le désir est caché dans nos sens, via notre mental ; notre intellect maintient le souvenir des plaisirs expérimentés et des attachements. Le désir induit l’illusion, l’irréel et nous empêche d’agir pour notre réalisation spirituelle (réel).
  • Verset 41 : la maîtrise de nos organes des sens est essentielle pour être maître de ses désirs afin de nous permettre d’être dans la connaissance et la sagesse.
  • Verset 42 : du moins subtil, au plus subtil, nous avons : – nos sens – notre mental qui contrôle les organes des sens – notre Intellect et Atman, la conscience pure dans le corps, le Soi. Nous avons tendance à nous identifier à notre corps, à nos émotions, à notre intellect. Quand nous détournons notre conscience de cette identification, nous retrouvons Atman, notre conscience pure.
  • Verset 43 : en reconnaissant Atman comme supérieur à l’intellect, en maîtrisant notre ego désirant. « Tue l’ennemi qu’est le désir et qui est certes difficile à vaincre », comme une bataille de tous les jours. C’est lorsque nous oublions notre vraie nature, que nous nous laissons aller dans nos désirs à travers nos organes des sens, notre mental et notre intellect. Nous aspirons à l’apaisement, en restant maîtres de nos émotions par la pratique et la connaissance spirituelle.

 

Si je peux me permettre un exemple vécu de mes désirs qui m’amènent dans le champ mental et émotionnel et donc dans la souffrance de la séparation. Voici : il m’arrive de désirer avoir mes enfants auprès de moi. Je ressens de la tristesse, voir même de la jalousie (qui découle de cette tristesse), envers les personnes avec qu’ils partagent des moments. Quand, je suis dans la conscience de ce qui se passe, je vois autrement. Je vois mon ego désirant ce qu’il n’a pas (donc frustré). Je peux alors me mettre en connexion à la joie que peuvent vivre mes enfants à ces moments-là, alors je suis reliée à leur joie, je ressens de la joie, le « je » égotique s’apaise, il rejoint un espace plus grand, un espace d’amour, Atman. Merci Catherine pour ton témoignage, car la Bhagavad-Gita, c’est tout à fait cela, elle nous guide. Ce n’est pas un texte « intellectuel », elle nous inspire pour éclairer nos actions et nous permettre d’avancer plus facilement vers notre lumière. (Nadège)

 

 

Chapitre 4 : Le renoncement à l’action dans la connaissance – Versets 1 à 8 – Gaëtan

 

Arjuna, initié au Karma yoga va devoir franchir un nouveau portail, celui de la connaissance. Pour ce faire Kṛṣṇa le pâtre doit laisser place à Kṛṣṇa l’incarnation divine, afin qu’Arjuna puisse se mettre dans des conditions propices à son entendement via la contemplation et la méditation.

Le verset 1 est sans équivoque : il introduit les premiers étudiants des Vedas qui ne sont autre que Vivasvān, le dieu soleil, son fils, Manu patriarche de l’Inde, Ikṣvāku, à l’origine d’une dynastie censée avoir régné longtemps sur l’ancienne Inde… Il se place donc à l’échelle d’un dieu qui les aurait précédés et initiés.

 

Dans le verset 2, Kṛṣṇa s’adresse à Arjuna en le nommant « parantapa », celui qui châtie les ennemis, comme pour le préparer à une lourde responsabilité, celle de reprendre le flambeau. En effet, la chaîne pendant longtemps ininterrompue de la transmission, initiée par le « seigneur » (ou la conscience universelle), poursuivie par les personnages illustres cités plus haut, a fini par se briser. Le Mahabarata est le théâtre de cette décadence contre laquelle Arjuna va devoir se dresser.

 

Le verset 3 est celui de la connivence maître/élève que Kṛṣṇa souhaite inspirer comme un préalable à l’assimilation de ce qui va suivre. Il a enseigné une sagesse ancienne, le Karma Yoga, voie royale vers l’Atman (Le Soi, conscience universelle et éternelle).

 

Le verset 4 replace Arjuna dans sa position d’élève. Il questionne ce qu’il reçoit, dans la plus pure tradition hindoue, et de ce doute viendra la compréhension et l’acceptation d’une vérité à laquelle il ne peut accéder seul. Comment son ami mortel pourrait-il avoir enseigné aux plus anciens?

 

Verset 5 : la réponse se situe dans le samsara (cycle des réincarnations), il se souvient de ses vies passées quand son élève ne connaît que son existence présente. Il porte les traces de ces imprégnations (vasanas), et est comme conditionné par elles, mais ne peut voir au-delà à ce stade.

 

Le verset 6 permet à Kṛṣṇa de développer sa réponse. Il a fait le choix de s’incarner et plutôt que de subir maya, l’illusion qui fait prendre le phénomène (existant) pour le noumène (essence), il utilise la puissance créatrice, sa Maya (dans une de ses autres acceptions). Il lui faut s’incarner pour accomplir ce qui doit l’être, guider les hommes vers leur éveil : la connaissance de l’Atman en eux.

 

Le verset 7 confirme l’hypothèse émise plus haut selon laquelle le Mahabarata décrirait le déclin de l’Inde, qui doit être sauvée de ce péril par des héros conscients de leur svadharma. Kṛṣṇa intervient, incarné bien que non-né, lorsque la menace revient, celle de l’abattement, de la perte de courage devant la tâche qu’il est pourtant essentiel d’accomplir.

 

Et c’est confirmé par le verset 8 : il est venu protéger les « bons », ou les bonnes tendances en l’homme, et détruire « les méchants », celles qui mènent l’homme vers son avilissement. Et ce, pour que le dharma soit respecté (« rétablissement de la justice »).

  • A l’heure ou des magnats concentrent un pouvoir phénoménal alors qu’ils sont guidés non pas par la conscience, mais par leur égo, et, ce faisant, entraînent l’humanité dans son ensemble vers un péril comparable à celui ici décrit, nous aimerions qu’un Kṛṣṇa nous apparaisse pour rétablir la justice.
  • Cependant Kṛṣṇa n’est pas une incarnation, mais la possibilité en nous de nous éveiller individuellement, en espérant que nous serons suffisamment nombreux à le faire, pour relever les défis qui nous attendent.

 

 

Chapitre 4 : Le renoncement à l’action dans la Connaissance – Versets 9-17 – Nadège

Verset 9 : « Celui qui voit sous leur vrai jour Ma naissance et Mon action divines, n’a pas à renaitre une fois qu’il a quitté son corps il vient à Moi, ô Ajuna » 

  • Ici, il est question de Śakti, la conscience-énergie.
  • En effet dans le Sāṅkhya, nous trouvons d’abord un substrat dont tout provient et qui n’a pas de forme, cela s’appelle Brahman qui est « plus subtil que l’atome, plus grand que le plus grand ».
  • Un autre texte, le Nāsadīya Sūkta dans le Rigveda, indique que le monde commençant à partir de rien grâce à la chaleur ; cela peut être considéré comme correspondant à la théorie du Big Bang : « ALORS, il n’y avait ni inexistant ni existant : il n’y avait ni royaume aérien, ni ciel au-delà. Qu’est-ce qui couvrait, et où ? Et qu’est-ce qui abritait ? Y avait-il de l’eau, une profondeur d’eau insondable ? »  Rig Veda X.129.1. « La mort n’existait pas alors, et rien d’immortel n’existait : aucun signe ne séparait le jour de la nuit. Cette Chose Unique, essoufflée, respirait par sa propre nature : en dehors d’elle, il n’y avait rien du tout ». Rig Veda X.129.2 (Wikipedia). Le texte commence par affirmer paradoxalement : « ni le non-existant n’existait, ni l’existant n’existait alors » (ná ásat āsīt ná u sāt āsīt tadānīm), ce qui est mis en parallèle au verset 2 par « alors la mort n’existait pas, ni l’immortel » (ná mṛtyúḥ āsīt amŕtam nā tārhi). Cependant, le verset 2 mentionne déjà qu’il y avait « un souffle sans souffle, de sa propre nature, celui-là » ānīt avātām svadhāyā tāt ekam). Au verset 3, l’être se dévoile : « de la chaleur (tapas) est né celui-là » (tāpasaḥ tāt mahinâ ajāyata ekam). Le verset 4 mentionne le désir (kama) comme la semence primordiale, et les premiers poètes-voyants (kavayas ou rishis)) qui « ont trouvé le lien de l’être dans le non-être avec la pensée de leur cœur » (Wikipedia)
  • Pour revenir à notre Sāṅkhya : de cette essence primordiale sans qualité (Brahman) émerge, puruṣa (le désir), la pure conscience éternelle et non manifestée qui comporte, elle, trois qualités de sat, l’absolu, chit, la conscience et ananda, la félicité. D’un point de vue symbolique, puruṣa serait un principe masculin, une force latente. Le reflet de cette pure conscience va donner naissance à tous les éléments existentiels ou « tattva » à commencer par Prakṛti, la source du monde des formes. Le principe étant que tout est énergie qui se manifeste sous des apparences différentes du plus subtil au plus dense. 
  • Prakṛti et Śakti sont les deux versants d’une même pièce, on pourrait dire que ces concepts représentent toute la création dans laquelle réside le principe de Brahman.
  • Brahman étant le noyau de notre existence, le connaître est devenir Brahman lui-même. C’est l’expérience directe de celle et celui qui s’abandonne totalement à la Vie à travers la contemplation. C’est un état au-delà du corps, des sens et du mental.
  • Ceux qui vivent cette union avec le Grand Tout, sortiront du cycle des transmigrations.

 

Verset 10 :

  • Ici, il est encore question de tapas : le feu de la connaissance qui purifie et libère des pulsions, tendances latentes, etc.
  • La pureté de l’esprit est la condition pour se réaliser (réaliser que l’on est Brahman).
  • Pour cela, le travail est nécessaire (le feu) pour s’affranchir des désirs, de la peur et de la haine.
  • L’abandon est la 3e condition, avoir confiance, prendre refuge dans la Vie elle-même et ce qu’elle propose.
  • En effet, le feu est au coeur de la vie : le feu digestif, le feu du métabolisme, le feu de la transcendance. Le feu permet le mouvement, le feu est mouvement. Le feu est au centre. Le feu est activé par l’air, le coeur.

 

Verset 11 : « Quelle que soit la manière dont les hommes m’approchent. Je les récompense toujours. Les hommes suivent Ma voie de multiples façons, ô fils de Pritha » (fils de la Terre)

  • C’est intéressant, car ici, il est question de ce que nous voulons REELLEMENT.
  • Notre cheminement et évolution sont déterminés par notre motivation.
  • D’une certaine manière toutes les invocations que nous formulons trouvent leur réalisation.
  • Toutes les voies sont bonnes si elles mènent au Résultat. Il n’y a pas besoin de passer sont temps à batailler sur telle ou telle manière : il faut saisir la corde sincère et tirer.

 

Verset 12 : ici, il est question des rituels : « Ceux qui désirent le résultat de leurs actions ici-bas, offrent des sacrifices aux dieux, parce que la satisfaction des désirs est rapidement obtenue par les actions menées dans ce monde. »

  • « Toutes les vaches sont dans l’étable » : ce qui signifient que les dieux sont d’abord des éléments internes de la constitution de chaque personne (fonctions cognitives et/ou archétypales) et dans un second temps, leur projections extérieures. Dans l’Arthavaveda (10-2-31), il est mentionné que le corps est la cité des Devas (les divinités) : il en existe un nombre incalculable, même si certaines sont plus apparentes que d’autres. Offrir des rituels (comme la pratique du yoga) à nos qualités, à nos aspirations, c’est en quelque sorte provoquer un effet miroir entre le microcosme à l’intérieur du macrocosme et le macrocosme à l’intérieur du microcosme ; les barrières tombent. C’est le rôle du mythe de nous conforter dans ce qui est bon pour nous, les autres créatures vivantes et l’univers.

 

Verset 13 : « Les quatre divisions entre l’homme (varṇa qui désigne la « couleur », c’est-à-dire un trait visible ou une caractéristique d’un être humain- tempérament) ont été créées par Moi selon les différences dans la nature mentale (guṇa : c’est-à-dire sattavique – lumière, pureté ; rajasique – mouvement, agitation ; tamasique – apathique, aux tendances négatives) et l’action (karma action et résultat de l’action). Bien que j’en sois l’auteur, je n’agis pas et ne suis pas sujet au changement. »

  • C’est en cultivant nos qualités que nous accédons à l’état de brāhmaṇa (qui est aussi en Inde, une caste – mais dans le yoga, les castes ne sont pas reconnues en tant que telles. Ce qui importe, c’est le travail, le cheminement : nous partons avec nos qualités, notre tempérament, nos défauts, etc. et plus nous devenons devenons lumineux, plus nous affaiblissons les voiles de māyā (l’illusion d’une personnalité) pour retrouver l’essence de l’être.

 

Verset 14 : Notre essence est nulle part affectée par l’impermanence, c’est uniquement par l’ego que nous ressentons l’attachement et de ce fait les affres de cet attachement. Dans la plénitude, il n’y a que la plénitude.

 

Verset 15 :  Les anciens aspirants spirituels ont menés cette action et ont atteint la libération. Sachant cela, nous sommes nous aussi inspirés. Cette voie très ancienne du non-attachement aux actions a fait ses preuves et grâce à ces différentes expériences, nous pouvons nous inscrire dans ces traces. Elle est valable pour tous, partout et tout le temps.

 

Verset 16 – « Qu’est-ce que l’action ? Qu’est-ce que l’inaction ? A cet égard, même les hommes emplis de sagesse se trompent. Par conséquent, Je vais t’enseigner « l’action » (la nature de l’action et de l’inaction) afin que cette connaissance te délivre du mal (samsāra, le cycle des naissances et des morts).

  • Action : mise en œuvre d’une intention, impulsion ; inaction : absence d’action ou cessation de l’action.
  • Dans ce verset, il est question de ce qui sous-jacent à l’action. Quel est le mobile ? Une « belle » action peut cacher de mauvaises motivations. L’action est juste lorsqu’elle est réalisée sans désir égoïste (niṣkāma). Ne pas agir, c’est « réagir » avec les pulsions, sans conscience. En quelque sorte une action est un acte réalisé en pleine conscience. Sinon, il n’y a pas d’action. Le but du yoga est de remettre de la conscience dans tous les aspects de notre vie.
  • L’inaction est aussi l’oisiveté qui ne mène nulle part.

 

Versets 17 : « Vraiment, la nature de l’action juste doit être connue, ainsi que celle de l’action répréhensible et celle de l’inaction. Le voie de l’action est difficile à comprendre. »

  • La vie est mouvement et de ce fait action. L’activité est inhérente à la vie. Les planètes, les plantes, les animaux, les êtres humains sont en action. Evidemment un certain type d’action engendrera un certain type de résultat.
  • Il y a différentes natures de l’action : vihita karma, l’action préconisée par les śāstras (les textes) : bonne action, action constructive ;  vikarma qui transgresse le dharma (mauvaise action, action destructrice) et l’inactivité, l’akarma qui ne permet aucune avancée.
  • La motivation de l’action détermine bien évidemment sa nature (plus souvent que l’action elle-même). L’action désintéressée est l’action suprême.

 

 

Chapitre 4 – versets 18 à 25 – Chérifa

 

Verset 18 : « Celui qui reconnait l’inaction dans l’action et l’action dans l’inaction est un sage parmi les hommes.il est un yogi et il accomplit vraiment toutes les actions. »

  • Krishna nous parle d’action et inaction : Qu’est-ce que l’action et qu’est-ce que l’inaction ? L’action a été définie dans les vers précèdent comme le résultat d’un désir, et l’inaction comme l’absence de désirs. Ici, on va induire la notion de non-dualité en mettant en avant l’importance de l’équanimité vue précédemment.  Puisque l’on peut être en inaction physique et être dans une action mentale, l’immobilité ne veut pas dire que nous sommes inactifs, et l’inverse, être en action physique avec un mental calme et présent, je fais mon action sans penser à tout et n’importe quoi, permet une inaction. Le sage, un être éveillé, comprend donc que l’inaction se trouve dans l’action et que l’action se trouve dans l’inaction. De ce fait toutes les actions sont accomplies, puisqu’il n’y a plus de séparation.  Ce qui importe au sage, c’est la présence en Soi dans l’action et la présence en Soi dans l’inaction, la maîtrise du mental. Cela permet de se détacher de l’acte et de pouvoir être observateur du monde.

 

Verset 19 : lorsque nos actions ne proviennent pas de désirs ou de but à des fins personnelles, lorsque nos actions sont purifiées par « le feu de la connaissance » (connaissance de « SOI »), nous vivons en être éveillé à ce qui est, le voile de l’illusion est dissous ;

  • Le feu de la connaissance équivalut à dire « Brahman » : dans ce verset, on nous dit que ceux-ci sont reconnus comme sage par les hommes avisés, ce qui induit que les insensés auront une autre attitude, peut être méprisante, voire violente.(On peut faire un petit parallèle avec notre époque, souvent les hommes ou femmes qui prônent des valeurs humanistes et participent à la création de valeur dans leur communauté pour le bien de tous, sont souvent dans un premier temps moqués ou persécutés par les sociétés qui enfermées dans les ego non observés, avides de buts personnels ne peuvent reconnaitre….Ce qui agit à travers ces êtres.

 

Versets 20 et 21 : ici, nous lisons la description d’un être libéré, donc défini comme sage.

  • « Ayant abandonné l’attachement pour le fruit de l’action. » : c’est une démarche volontaire (« ayant abandonné »). L’abandon nous renvoie aussi à la foi, abandonnée de façon volontaire, c’est notre choix notre responsabilité nous ne subissons pas.
  • « Pour le fruit de l’action »: le résultat, donc ici détaché de l’espoir d’une amélioration personnelle ou d’un but personnel égoïste.
  • « Toujours satisfait » nous renvoie au sentiment de gratitude dans toute chose et aussi nous sommes dans le non-duel. Toujours satisfait, le résultat n’est plus coloré d’attente conditionnée par le lieu ou les hommes qui observent l’action. Ce que pense autrui n’a pas d’importance, puisque je ne cherche aucun résultat personnel.
  • « Il n’agit pas, bien qu’il soit engagé dans l’action » : ici est introduite la notion de service. Si je fais une action, mais je n’agis pas, car détaché du résultat, car mon action ne poursuit pas un but personnel. Alors qui agit ?
  • Abandonner l’attachement aux résultats, « libre de tout désir », « Le mental et le soi maitrisés » (ici le petit soi, pas de majuscule= l’ego), abandonné de toute possession, c’est uniquement le corps qui agit, il sait que ce n’est pas lui qui agit et que le résultat n’est pas à lui. Donc il ne commet aucune faute.

 

Versets 22 et 23

  • Verset 22 : dans ce verset, on affirme que lorsque l’ego est transcendé (grâce au feu de la connaissance), nos actions ne sont plus animées par un désir égoïste ni nourries par l’anxiété du résultat. Nous pouvons être satisfaits de ce qui est.
  • « Sans effort » =sans volonté. Notre énergie n’est plus dirigée vers le vouloir, mais vers l’être. Libérés de l’ego, nous ne subissons plus les présupposés extérieurs. Il n’y a plus de mal ou de bien, de succès ou d’échec, évaluation séparatiste, nourriture de l’ego. De ce fait, celui qui maîtrise l’état d’équanimité agit sans être lié, donc il est libre de ses actions
  • Verset 23 : il est libre, car « toutes les actions, accomplies par l’être détaché, libéré, dont le mental est établi dans la connaissance et qui agit dans un esprit de sacrifice, sont dissoutes ». Donc les actions désintéressées, et un esprit de sacrifice (abandon au feu sacré (il est en nous), des choses en nous qui sont erronées et qui ne nous servent plus) ne créent pas de vasanas (empreintes).
  • Le service: être au service de la création.
  • Service = (sert la vie). Est donc l’attitude du sage : il fait ce qu’il à faire, son corps est au service, car il sait que ce qui agit à travers lui, n’est pas lui ; il est libre, car il ne s’approprie pas les œuvres de ce qui agit à travers lui, le sage est au service de la création. Il est le danseur, la vie la musique… et qui est le musicien ?

 

Versets 24 et 25

  • Le musicien est la musique, la musique est le danseur, le danseur est le musicien, le danseur est l’instrument de musique.
  • Brahman, est la vie, la vie est brahman
  • Le sage est l’instrument, la musique et le danseur au service de la création.
  • Nous laissons donc Brahman agir à travers le corps.
  • Le corps devient le temple où la vie s’exprime, nous laissons donc Brahman agir à travers le corps. Le corps devient l’hommage à la vie, une forme de la création au service de la création.
  • Être au service nous permet de nous inscrire dans la mélodie éternelle de l’univers, de vibrer la musique et de danser la vie avec beauté et splendeur. Tout devient, harmonieux, car libre ; la forme est libre d’exprimer la vie telle quelle est : paix et beauté.
  • Ici, on nous invite à ne pas limiter nos offrandes, à vivre sans ménager sa vie incarnée. Le sacrifice dans le feu sacré, c’est offrir au feu tout de nous, sans se limiter, offrir l’expérience de l’esprit incarné au feu de Brahman.

 

Chapitre 4 – Le renoncement à l’action – versets 26 à 33 – Catherine

 

  • Verset 26 : « dans le feu du contrôle des sens », celui-ci est l’esprit, composé du mental et de l’intellect, qui a transcendé sa condition égotique et s’est installé dans la Conscience pure, par les pratiques yogiques. Ceci permet de se mettre en retrait des désirs matériels. Pour moi ce verset est plutôt abstrait, j’ai donné un sens à la 1ere partie du verset, mais j’ai des difficultés à analyser la 2e partie. 

« Certains offrent l’ouïe et les autres sens en sacrifice dans le feu du contrôle des sens ; d’autres donnent le son et d’autres objets des sens en sacrifice dans le feu des sens » : ici, il y a deux types de yajña.

Yajña  : le rituel ou sacrifice dans le sens de sacré ; c’est une action destinée à purifier , à s’unir avec notre essence sacrée. Voici ce qu’en dit Shri Shri Ravi Shankar : « donner, partager, offrir. C’est un yajna qui purifie notre vie, notre esprit et nos actions. Puisque l’univers tout entier est un yajna, un échange se produit dans l’univers entier. Entre les éléments, il y a échange et échange : l’air aide le feu à s’exprimer ; le feu aide l’eau à se transformer en vapeur ; et l’eau aide la terre à s’épanouir. Si vous observez ces éléments, il y a échange et échange dans l’univers entier. Nous inspirons et expirons : c’est un yajna. Le Seigneur Krishna a énuméré différents types de yajna. Le yajna est l’échange et l’échange qui purifie la vie humaine, l’esprit humain. Nous inspirons et expirons. L’air est appelé Pavan, ce qui signifie « le purificateur ». L’air pénètre et purifie tout le corps. Le feu est appelé Pavak, ce qui signifie « purificateur ». Son nom même indique son action en sanskrit. Le feu purifie, l’air purifie, l’eau purifie – votre action devrait en faire autant. Les actions qui ont un effet purificateur, comme la méditation ou les projets de service, purifient toutes notre esprit. »

« Certains offrent l’ouïe et les autres sens en sacrifice dans le feu du contrôle des sens » : le retrait des sens, pratyahara est un élément essentiel dans le cheminement du yoga. Il n’y a  pas de puissance ou de lumière si les sens sont débridés. Cest une condition essenielle si nous voulons parvenir à la sagesse.

« d’autres donnent le son et d’autres objets des sens en sacrifice dans le feu des sens » : retirer le mental des sens et il n’y a plus d’objet auquel s’accrocher. Le mental est continuellement tourné vers l’extérieur, le ramener à la source. C’est la fuite vers les objets extérieurs qui cause autant de confusion et de souffrance. Le mental ramené au calme ne souffre plus.

  •  Verset 27 : la maîtrise de soi, la maîtrise de l’ego par une pratique de chaque instant. Le mot maîtrise me parait plus fort que contrôle. Le contrôle serait pour moi, une volonté mentale. La maîtrise se ferait à un niveau plus subtil, plus installé au niveau de la conscience du Soi.

« D’autres encore sacrifient toutes les fonctions des sens ainsi que celle de la respiration (énergie vitale) dans le feu du yoga de la maîtrise de soi, allumé par la connaissance » : le mental est un obsacle : il veut être calife à la place du calife. Le retrait des sens et le contrôle de la respiration vont permettre de l’apaiser, le vider… La respiration comme yajña, la purification, l’union avec le divin. Inspiration « So », expiration « Ham » : je suis cela. (le suis la conscience).

« La connaissance » ou jñāna comprend de nombreuses significations, mais principalement la connaissance du Soi, la réalisation par la compréhension : « allumé par la connaissance », donc initié par cette compréhension au-delà du mental. Ces versets sont particulièrement intéressants, car ils donnent des indications quant aux méthodes qui permettent de retrouver notre grande sagesse intérieure. La lumière intérieure de la conscience nous aide à retrouver le sens de la Vie. 

  • Verset 28 : ici, il nous est montré 2 manières de vivre dans la conscience du Soi. D’offrir sa richesse (matérielle et de cœur), de vivre simplement et dans l’état de yoga. Une autre manière, celle des ascètes qui vivent dans la maîtrise d’eux même et étudient les écritures et transmettent leur compréhension.

« D’autres offrent la richesse, l’austérité et le yoga en sacrifice, tandis que les ascètes, qui observent la maîtrise d’eux-mêmes et des voeux fermes, offrent leur étude aux Ecritures et la connaissance en sacrifice » : il faut comprendre le mot sacrifice en tant que yajña

  1. Dravyayajña : offrir la richesse, le don matériel et/ou immatériel (temps, affection, patience, etc.)
  2. Tapoyajña : se soumettre à l’ascèse, la discipline : la pratique, le jeûne, le silence, la modération , etc.
  3. Yogayajña : la méditation
  4. Svādhyāyayajña : l’étude de soi, l’introspection, l’étude des textes
  5. jñānayajña : la compréhension de plus en plus élevée de la conscience

Selon nos samskaras, nous serons plus enclins à poursuivre l’une ou l’autre des pratiques, ou toutes selon le moment. Certains font des voeux stricts pour oeuvrer à la réalistion du Soi. L’action est nécessaire pour purifier les empreintes mentales qui empêchent de lever les voiles de maya. La persévérance finit toujours par l’emporter. Cette réalisation a un prix, car il est demandé de laisser tomber les plaisirs futiles pour revenir à l’essentiel. Cependant, cela n’est rien en comparaison de ce qui gagné en paix intérieure, maîtrise de soi, compréhension du monde, etc.

  • Verset 29 : ici le pranayama est décrit comme permettant la maîtrise du soi. Le Prana ne représente pas uniquement la respiration avec l’inspiration et l’expiration, mais aussi les fonctions physiologiques du corps.

 » D’autres offrent en sacrifice l’expiration (apāna) dans l’inspiration (prāṇa ) et l’inspiration dans l’expiration, régulant l’inspiration et l’expiration (prāṇāyama) , totalement absorbés dans la régulation du souffle »  : le travail sur la respiration est essentiel pour contrôler le mental. C’est la clé de la santé, du bien-être et du développement de la conscience. Equilibrer apāna vayu et prāṇa vayu va permettre de garder un mental sain et calme. La respiration est étroitement liée aux activités mentales : quand il est agité, elle est agitée, quand il est calme, elle est calme. A travers le changement de rythme respiratoire, nous intervenons directement sur l’état mental. «Le prana brûle comme le feu; il brille tel le soleil, il est le nuage de pluie bienfaisant et il souffle tel le vent. Il est la terre et la lune ; il a une forme et n’en a pas ; le prana est l’immortalité » Prasna Upanishad  https://yogafleurdelotus.com/la-vie-cest-la-respiration-la-respiration-cest-la-vie/

  1. Pūraka : inspiration 
  2. Recaka : expiration 
  3. Kumhaka :  suspension du souffle

  •  Verset 30 : l’alimentation et la respiration permettent de réguler le mental, de le purifier et de détruire les tendances négatives, afin de progresser spirituellement.

 » D’autres, par la régulation de leur nourriture, offrent les airs vitaux dans la force vitale (prāṇa). Tous sont des connaisseurs du sacrifice, et leurs démérites (fautes) sont détruits par le sacrifice » : dans le yoga et l’ayurveda, la diététique joue un rôle très important. Mal manger, manger des nourritures trop lourdes, de mauvaise qualité ou qui ne correspondent pas à notre constitution va entraîner de nombreux déséquilibres, pas simplement physiques, mais également mentaux. Chaque saveur induit un certain état mental : abuser d’une même saveur va déséquilibrer fortement émotionnellement. Les six rasas sont : sucré, acide, salé, piquant, amer & astringent. Le doux favorise la fertilité, mais trop de douceur ramollit le corps. L’acide est stimulant, mais s’il n’est pas utilisé à bon escient, il génère des conflits. Le salé apporte fermeté et structure, cependant, trop de sel empoisonne le sang et provoque des maladies cutanées. Les aliments amers ont un effet purifiant , mais son excès rend amer.  Tout comme l’amer, l’alimentation astringente exerce un effet dépuratif et fortifiant sur l’esprit. L’astringent aide à se recentrer, mais une alimentation trop astringente peut rendre nihiliste. Chaque saveur est liée à certains organes et nuit à ces organes lorsque consommée en excès : Sucre : rate et pancréas ; Acide : foie ; Salé : reins ; Piquant : poumons ; Amer : cœur ; Astringent : côlon. Chaque saveur est également liée à nos émotions. Les émotions nous affectent de la même manière que la nourriture. Elles peuvent provoquer des maladies et augmenter les effets thérapeutiques des plantes médicinales : Émotions chaudes : colère, haine, envie ; Émotions froides : peur, peine, chagrin : Sucré : l’amour ; Acide : l’envie ; Salé : avidité ; Piquant : haine ; Amer : chagrin ; Astringent : peurs. 

Il est donc important d’être conscient de notre alimentation , de la manière dont nous mangeons et quel type d’aliment, nous ingérons. 

Tous sont des connaisseurs du sacrifice, et leurs démérites (fautes) sont détruits par le sacrifice » : ceux qui engagent des actions conscientes pour revenir à l’unité cosmique, vont assurément vaincre leur démons. C’est encourageant de savoir aussi que l’effort n’est pas vain, même s’il peut être long.

  • Verset 31 : ma compréhension de ce verset est limitée. Je comprends l’importance de la pratique, de la discipline dans les pratiques yogiques pour se libérer du soi et s’installer dans le Soi, cela apaise dans cette vie et la suivante.

 » Ceux qui consomment le nectar, reste du sacrifice, vont à l’éternel brahman. Ceux qui n’accomplisent pas de sacrifice n’ont aucun droit sur ce monde ; comment alors pourraient-ils en avoir dans l’autre, ô Meilleur d’entre les Kuru? : après avoir expliqué les différents yajñas, Krishna énonce les mérites : donner le reste de nourriture, mettre en oeuvre une action vertueuse donne toujours des fruits. Les  yajñas détruisent les racines du mal et le « reste » (les restes) est le nectar de la paix et de la joie qui va répandre sa lumière en nous (aller à Brahman) . Ce qui est dit aussi dans la seconde partie du verset est que ceux qui ne pratiquent pas n’obtiennent rien. Ils perdent les deux mondes, le monde de la joie et le monde de l’au-delà, de la conscience. L’effort doit être sincère et constant. 

  • Versets 32 -33 : les techniques pratiquées avec discipline permettent de se libérer des attachements matériels, permettant de se libérer des souffrances.

Verset 32 : « Ainsi les innombrables sacrifices sont-ils déployés devant la face de Brahman (mènent à lui). Sache que tous sont nés de l’action et, sachant cela, tu seras libéré.  » : tous les yajñas mentionnés précédemment ou d’autres encore mènent tous à la lumière intérieure, et viennent tous de l’action. Une action délibérée , une action juste vise à purifier le mental et à apporter la paix. L’inaction n’apporte que des malheurs; il est important d’agir sans peur et sans égoïsme.

Verset 33  : « Le sacrifice de la Connaissance est supérieure au sacifice des objets, Paraṃtapa (celui qui soumet l’ennemi). Toutes les actions,  Pārtha (fils de la Terre), culminent dans la Connaissance  » : dans ce verset, il est dit que jñānayajña est plus important encore que dravyayajña. 

jñānayajña : la compréhension de plus en plus élevée de la conscience implique la recherche de qui nous sommes vraiment sans artifice, avec authenticité où le mental n’interviendra plus. Les fruits sont le Connaissance de Soi. C’est la fin de Karma (l’action). L’ego étant complètement anéanti. 

Dravyayajña est l’offrande de richesse, le don matériel et/ou immatériel (temps, affection, patience, etc.) : ici il y a un rique égotique d’assujetissement del’autre ou autres « dérapage » égotique. 

 

Chapitre 4 – Versets 34 à 25 – Gaëtan

Le Verset 34 décrit la relation maître/étudiant. Elle implique humilité et abandon du côté de l’apprenant, mais cet abandon ou confiance ne signifie pas docilité et absence d’esprit critique. Il s’agit d’une attitude dynamique qui passe par des questionnements, ce qui place l’élève dans une forme de responsabilité vis à vis de ce qu’il va ou non, recevoir. Le maître n’est pas celui qui donne tout gratuitement et magiquement, mais celui qui va guider. Un guide ne marche pas à la place des autres. Le mot « longuement » est employé et induit qu’il s’agit bien d’un processus et d’une discipline. Pas d’un héritage sans contrepartie.

Sur quel chemin l’élève est-il invité à avancer ? Celui de la Connaissance, celle du Soi. Le maître qui connaît la Vérité : comprendre qui voit par-delà le voile de maya et sait que tout est lié, que la Conscience est dans l’individu comme dans le Tout et que ce qui est Réel l’a toujours été et le sera toujours- installé dans son Soi le guidera vers le sien.

Verset 35 : « tu verras tous les êtres dans le Soi ». Je comprends ces mots ainsi : Arjuna craint de pécher et ainsi d’alourdir ses vasanas en affrontant, voire tuant des ennemis qui furent jadis des alliés et dont certains d’entre eux sont méritants. Cependant, rester à ce niveau de compréhension revient à être dans l’erreur, l’ignorance, l’Illusion. La véritable essence de ces êtres est impérissable, leurs mérites ne peuvent pas être affectés par les actions des autres, ainsi, si Arjuna s’installe dans son Soi et considère celui des autres, il n’aura plus rien à craindre. Cette vérité est présentée comme définitive par Krisna. C’est un message rassurant à destination de ceux qui pourraient être tentés par le découragement en empruntant la voie ardue du yoga.

Dans le Verset 36 : Krishna poursuit sa démarche de réassurance vis-à-vis de son élève et va plus loin. Quelles qu’aient été ses actions passées, l’élève peut prétendre au but ultime. La Sagesse, que j’interprète comme la pratique du Yoga, lui permettra de se purifier. C’est une invitation à l’optimisme et un renouvellement de l’affirmation d’universalité du Yoga : il n’est pas réservé à une élite de saints et d’érudits, mais concerne tous ceux qui ont la volonté de se réaliser et font preuve de courage pour rester sur ce chemin.

Le Verset 37 évoque les sacrifices via l’image du Feu, archétype de la Purification et de la Transformation. Une fois passés par le feu, quelle que fut notre nature et quoi que nous ayons fait, nous sommes tous les mêmes, construits avec les mêmes matériaux et retournant d’où nous venons.

Je fais un parallèle avec ceci : « C’est à la sueur de ton visage que tu mangeras du pain, jusqu’à ce que tu retournes à la terre, puisque c’est d’elle que tu as été pris ; car tu es poussière, et tu retourneras à la poussière. » Genèse 3:19

Il s’agit de messages qui invitent à l’humilité et qui promettent l’égalité entre les hommes. Celui qui s’en donne la peine obtiendra ce qu’il mérite, il n’est jamais trop tard pour agir de manière juste.

Le Verset 38 est à l’image de ces petites synthèses récurrentes propres aux enseignements du Yoga. Il s’agit de revenir sur ce qui a été dit pour « creuser le sillon » approfondir et peut-être aller un peu plus loin si nous y sommes prêts. Le Yoga est présenté comme le purificateur parmi les purificateurs et la récompense est promise : « atteint finalement le Soi ». Cela arrive « Finalement » donc quand c’est le temps pour lui, une fois qu’il a suffisamment parcouru le chemin vers lui-même.

Verset 39 : dans la même idée, Krishna propose une nouvelle synthèse. Il récapitule la marche à suivre. Les maîtres mots sont : Foi, Connaissance et contrôle des sens (pratyahara).

  • La Foi renvoie à la confiance nécessaire, en soi et en l’existence d’un Soi, ainsi qu’en le maître. Il s’agit d’un préalable qui nécessite lui-même une attitude d’humilité.
  • La recherche du Soi, via les différents sacrifices évoqués au long du chapitre 4, c’est la voie de la Connaissance que l’on ne peut emprunter que si nous tenons les rênes de nos sens, prérequis pour accéder à l’intériorité.
  • Krisna emploie le mot « perfection » en désignant le Yoga. Je pense que cela renvoie à la divinité en nous. Il s’agit d’un chemin divin vers notre propre divinité et l’objectif est à la hauteur : « la Paix suprême ». Je la comprends comme une Paix qui ne tiendrait pas compte des contingences matérielles et des désirs. Une installation durable dans le Bonheur quelles que soient les circonstances.

Le Verset 40 revient sur la notion de Foi et en redit l’importance. Le doute y est présenté comme l’Ennemi suprême de celui qui veut parvenir à la Réalisation. Il condamne l’individu à rester dans la roue de la réincarnation sans perspective d’amélioration.

Le Verset 41 intervient comme une dernière synthèse, qui revient sur les enseignements du chapitre 4 avant que le Verset 42 ne vienne remettre Arjuna dans l’action. Il convoque à nouveau le conquérant (« dhananjaya ») dans le verset 41 et emploie un vocabulaire militaire dans le verset 42 (« tranche », « épée »).

  • Nous sommes invités à abandonner nos doutes, et dans la maîtrise de nos sens, conscients que nos actions ne doivent pas être motivées par des désirs ou réalisées en réaction aux circonstances, sans attente des fruits de nos actions, nous devons nous engager courageusement dans la seule bataille qui compte : contre l’ignorance de nous-mêmes.
  • Mais Krisna n’est pas seulement un conseiller militaire, il n’oublie pas de nous rassurer en nous rappelant que nous trouverons refuge dans notre pratique du Yoga.

 

 

Chapitre 5 – Le renoncement à l’action – Versets 1-8 – Nadège

 

  • Verset 1 : ici, nous revenons à la question d’Arjuna qui demande après toutes les explications de Krishna, quelle voie est la meilleure : celle de l’action (karma) ou celle du renoncement à l’action (la connaissance) ? Cependant, si nous avons bien « écouté » (lu), il semble que la voie de l’action et la voie du renoncement à l’action ne semblent pas être un choix radical, il y a l’action et il y a la connaissance, tout cela est totalement imbriqué.

 

  • Verset 2 : Krishna répond que la voie de l’action est supérieure à la voie du renoncement à l’action : en effet, lorsque nous n’avons pas réalisé le Soi, cette voie du renoncement est très difficile, car si nous ne comprenons pas intrinsèquement que nous sommes Conscience, l’inaction sera alors fatale. L’action va donner des résultats en épurant les voiles pour que nous puissions découvrir la vérité. Au départ, lorsque nous commençons dans la voie du yoga, nous suivons les indications et progressivement de nouvelles perspectives s’ouvrent à nous. Sans cela, n’aurions-nous jamais tenté de comprendre le Soi ? Quand les vasanas (tendances latentes) seront épurés, l’évidence se fera.

 

  • Verset 3 : la pratique régulière va permettre d’affaiblir le principe de dualité du mental et les aversions. Le sage, le sannyāsīn, le renonçant, accordera plus d’importance à sa nature supérieure, qu’inférieure et ses désirs égotiques ; le sannyāsīn s’élève au-delà de la dualité, des jugements, de l’attachement et de la haine. Le mental est en constant mouvement entre les opposés, joie, peine, bon, mauvais, etc. C’est l’ascenseur émotionnel qui créé d’énormes perturbations. L’abandon à la vie apporte la paix. C’est en se libérant de cette fonction duelle qu’il sera possible de se libérer. Cela est une tâche difficile, mais retrouver la conscience, se libérer passe par cette étape essentielle (abandonner l’égoïsme).

 

  • Verset 4 : dans ce verset, il est dit que « seuls les esprits puérils, et non les sages, parlent du samkhya (connaissance) et du yoga (action), comme deux choses distinctes », alors qu’établi dans l’un des deux, on obtient les fruits des deux : certains peuvent à travers la Connaissance, séparer le réel de l’irréel, séparer ce qui est vu (Brahman) du monde phénoménal (le monde des formes, impermanent). D’autres ont besoin de l’action pour parvenir à distinguer cela. Cependant, les deux mènent à la même chose, le Soi. Le seul principe à suivre : être fermement établi dans sa pratique et la suivre avec persévérance, quelle que soit la voie choisie, alors il y aura un résultat : un vrai humanisme.

 

  • Verset 5 : Krishna réitère sur ce point, derrière chaque sadhana, il y a le même aboutissement. Il n’y a donc pas de différence. « Celui qui voit le samkhya et le yoga comme identiques, voit juste » : le terme « voir » dans le sens de lumière, de la clarté mentale, au-delà des principes ou jugements. Le yoga (action) est pratiqué pour amener à la méditation (samkhya). L’un et l’autre s’imbriquent pour mener à la sagesse.

 

  • Verset 6 : « Mais le renoncement, ô Guerrier aux bras puissants est difficile à atteindre sans le yoga (de l’action). L’homme harmonisé par le yoga et devenu contemplatif atteint rapidement Brahman. » : «ô Guerrier aux bras puissants » : ici Krishna fait référence aux capacités d’Arjuna (qui est un puissant archer, donc qui peut atteindre sa cible). Se purifier, laisser partir les schémas, conditionnements, etc. demandent une action ; sans ce préalable, il est difficile de se tenir dans l’état d’équanimité et de calme nécessaires à la Connaissance. Les vasanas ne sont surmontés qu’avec une pratique régulière et même ainsi nous savons que certaines traces peuvent perdurer. Avec le yoga (action), et l’abandon à la vie, il sera possible d’atteindre ce que nous sommes vraiment. C’est la raison pour laquelle l’action est préconisée, car elle va permettre le renoncement.

 

  • Verset 7 : Krishna revient sur celui qui mène une action juste avec un mental maîtrisé, qui perçoit le Soi et reconnaît que le Soi en lui existe chez tous les êtres, celui-là n’est pas affecté par l’action : c’est un être de sagesse parfaite. Lorsque nous reconnaissons que le Soi en nous est le Soi chez tous, la haine est détruite, l’égoïsme est anéanti. Il n’y a pas de compétition, de comparaison, d’envie, de jalousie, d’aversion qui enchaînent à la roue de la transmigration.

 

  • Versets 8 et 9 : le sage agit dans le monde en toute simplicité avec son cœur comme guide. Il agit avec sa conscience (le Soi, Brahman). Il n’est plus Jivatman, celui qui sépare, s’identifie au mental, aux émotions, au corps, etc. Il sait que « la personnalité »est une fiction, il voit à travers, au-delà des apparences et des perturbations.
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